mercredi 10 octobre 2007

Le voyage de Tchang E - II

Un jour, alors qu'il se trouvait à proximité du Mont Kunlun, Hou Yi entendit les habitants discuter à propos d’un sachet de pilules, appelées « Longue vie », réputées pour leur capacité à vous conduire au ciel. A ces propos, il fut fou de joie ! Il avait enfin fini de payer pour son crime. Après un si long périple, il pourrait enfin retourner au ciel, grâce à cet élixir. Jubilant, il se hâta de rentrer chez lui, pour rapporter la bonne nouvelle à Tchang E. Mais le bonheur n’arrive hélas jamais accompagné. Puisqu’au même moment, un malheur frappa la terre. Les montagnes et le ciel se mirent à pleurer. Des inondations désastreuses suivirent. Hou Yi pour assurer la survie de Tchang E partit à la chasse aux animaux marins. Mais les inondations furent si catastrophiques que les animaux se firent de plus en plus rares. Tchang E attristée, désespérée, se plaignait sans cesse. Et alors que la lune suspendue hautement et fièrement dans le ciel permettait au soir et à la nuit de s’installer, Hou Yi reprit le chemin de la chasse.

Tchang E resta seule à la maison, plongée dans ses souvenirs. Ah !! Qu’il était bon le temps de la cours céleste, où les saisons immortelles étaient insoucieuses, la vie paisible, les promenades se faisaient sur les nuages et les discussions au clair de lune… De souvenirs en souvenirs, Tchang E sombra dans une mélancolie profonde. Son spleen était si fort que Tchang E se précipita vers la cuisine où le sachet contenant l’élixir avait été soigneusement déposé par Hou Yi.

Le sachet en main, Tchang E hésitait encore, quand soudain, elle entendit un hennissement. Prise de panique, elle absorba le sachet en une seule gorgée. Presque immédiatement, son cœur devint léger, léger, léger… Alors que Hou Yi descendait de sa monture, Tchang E commença à flotter. Puis ses pieds quittèrent le sol de plus en plus haut. Quand Hou Yi pensa la retenir, il était déjà trop tard. Tchang E s’envolait pour disparaître bientôt du regard de Hou Yi et de l’horizon.

Tchang E, toujours plus haut, aperçut soudain la grande porte de la cours céleste. Les dieux, tous à l’entrée pour observer l’objet de leur dérangement, la regardaient.
Tchang E, innocente, naïve, crut qu’un accueil lui était réservé. Tout sourire, elle continua de se rapprocher de la porte. Mais très vite Tchang E put entendre les insultes et les propos réprobateurs que les dieux proféraient à son insu. Tchang E, honteuse, regrettant profondément son attitude, tête baissée, poursuivit courageusement son chemin. Abattue par son acte, elle se dit que le mieux était de s’orienter vers le palais glacé de la lune. Ce qu’elle fit…

Elle laissa la porte de la cour céleste derrière elle et se dirigeât vers la lune.

Et voici comment Tchang E devint une jeune femme solitaire, l’ombre du palais glacé de la lune.

Le voyage de Tchang E - I

Voici comment la jeune Tchang E, épouse du dieu archer Hou Yi, se retrouva enfermée sur la lune...

D’après la légende, sur la lune vit un lapin blanc, pilant du riz, jour et nuit. Ce lapin, tout le monde le surnomme le lapin de Jade.
Quant à son voisin, Wu Gang, il coupe du bois. Au fil des ans, armé de sa petite hache, Wu Gang coupe les arbres de la forêt lunaire. Tchak, Tchak, Tchak… Sans s’arrêter.
La légende raconte que l’empereur Ming de la dynastie Tang voyagea lui aussi en personne sur la lune et son palais.
Mais le jour de la fête de la lune, l’histoire que tout le monde à sur le bout des lèvres, est celle de Tchang E et son voyage sur la lune.

Les gens disent qu’à l’époque du souverain mythique Yao, sur la terre, apparurent dix soleils. La terre commença alors à brûler et les problèmes se multiplièrent : les fleuves s’asséchèrent, les forêts s’embrasèrent et le peuple affligé par cette terrible chaleur fut décimé progressivement.
Le grand Empereur céleste de Jade, voyant sa population mourir ainsi, ordonna au dieu archer, son disciple, appelé Hou Yi, de descendre du ciel afin de sauver son peuple de cet enfer. Ce jour-là, Hou Yi descendit sur terre, accompagné de sa femme, Tchang E.
Au commencement, Hou Yi se contenta de dire à sa femme : « Espérons que les dix soleils ne réapparaîtront plus ensemble, qu’ils alternent pour éclairer le peuple et tout rentrera dans l’ordre. » Mais l’affaire ne fut pas aussi simple !

Les dix soleils, non seulement continuèrent d’apparaître ensemble, mais encore leur puissance augmenta tout en se rapprochant davantage de la terre. Finalement, la terre prit feu. Tout brûla. Ce fut un désastre. Face à cet affreux spectacle, Hou Yi prit son arc noir et tira droit sur les soleils. Et une, deux, trois flèches filèrent ! Quand il ne resta plus qu’un seul soleil, pour éclairer la terre. Celle-ci pouvait retrouver ses zones d’ombres. L’unique soleil restant était bien sûr le seul que le dieu archer avait épargné de son arc.

Hélas, Hou Yi avait oublié que le soleil était le fils de l’Empereur de Jade céleste. Et en tuant les 9 fils de l’Empereur de Jade, Hou Yi commit l’irréparable.
L’Empereur de Jade, très touché par ces neuf disparitions et terriblement en colère, interdit à Hou Yi et son épouse leur retour à la cour céleste. Pauvre Hou Yi, il croyait bien faire. Il ne voulait que sauver la terre de cette catastrophe. Avec son épouse, il n’avait alors plus qu’à vivre sur terre et à endurer les difficultés et les misères du peuple.

Quoiqu’il en soit, Hou Yi avait bon cœur et décida d’éliminer sur terre, tous les animaux étranges et féroces de la terre.
Alors qu’il était à la chasse, lui vint à l’esprit une idée : en faisant toutes ces bonnes actions, l’Empereur de Jade ne pourrait que lui pardonner. Et il préparât ainsi avec dévouement un grand banquet fait du gibier chassé en l’honneur de sa majesté céleste. Rempli d’espoir, il attendit la permission de sa Majesté de Jade pour rentrer au royaume accompagné de son épouse. Or contre toute attente, sa Majesté se montra complètement indifférente à tout ce dévouement. Cette ignorance commença à irriter Tchang E. Celle-ci se plaignait constamment. Elle voulait revenir à la cour céleste. Ses plaintes devinrent tellement fréquentes que Hou Yi choisit de quitter son foyer.

Le tour du monde de Hou Yi débuta...


vendredi 28 septembre 2007

Sur la lune - II - le second voyage de l'empereur

La deuxième partie du voyage de l'empereur Tang Xuanzong sur la lune.

Le lendemain, l’empereur Tang Xuanzong ne cessa de repenser à l'air de flûte du palais de glace.
Aussi, pour être certain de ne pas oublier cet air de musique, avec l’aide du musicien de la cour, il recomposa l'air enchanté.

L’automne était arrivé très vite cette année là. L’empereur Tang, toujours incapable de retourner sur la lune, était désespéré.
Quand, le quinzième jour du huitième mois de l’année, il tomba dans un sommeil profond qui l’emmena à proximité d’un pont tout blanc. Là-bas, l’attendait un palanquin et ses quatre porteurs. L’empereur s’y installa et le palanquin s’envola. Et son royaume disparut progressivement pour laisser place à un palais merveilleux aux murs de jade!
Le jardin qui entourait le palais était tout aussi enchanté avec un jardin de fleurs si coloré que l’empereur en avait la vue troublée. Quand un bruit attira son attention.

Kac, kac, kac.

L’empereur, curieux, continua à s’approcher du bruit et vit un homme couper du bois. Mais ce qui retint surtout son attention, c’est que chaque arbre coupé repoussait aussitôt. L’empereur interrogea alors l'homme des bois.
«Votre majesté » lui répondit le bûcheron, « permettez-moi de me présenter, Wukang, bûcheron de la lune. Les sages m’ont ordonné de couper du bois en punition de mes fautes passées.»
« Mais mon brave, vos arbres repoussent tous. Il n’est donc pas nécessaire de vous épuiser à cette tâche»
« Mon seigneur, si ces arbres repoussent, c’est pour m’apprendre la patience. C'est pourquoi j'ai l'ordre des dieux de couper des arbres qui repoussent tous les jours». L’empereur laissa Wukang à sa besogne.

Il pénétra dans une forêt. Près d’un pont, un lapin blanc était en train de moudre des plantes médicinales. C’était le lapin de jade, envoyé ici par les dieux, pour fabriquer la poudre des dieux. L’empereur essaya de s’approcher du lapin pour se présenter.

Hélas, le lapin de jade prit peur et s’enfuit.

Toujours en voyage sur la lune, sa majesté poursuivait sa visite, en quête du joueur de flûte. Il entra dans un jardin de bananier, au centre duquel, était placée une petite maison en pierre, sans porte. Il s’approcha alors pour y chercher une entrée, quand il recula, effrayé.
« Ah, mais qu’est-ce que… c’est que ce truc !!»
Choqué, sans voix. L’empereur, peu téméraire pourtant, mais surtout curieux, s’approcha de cette maison. Il étudia cette forme grise plus attentivement, quand il commença à décerner une forme, comme un coquillage géant, avec trois jambes et une grande bouche. Il était face au crapaud, mangeur de lune. Aussi, parce qu’il avait pour mauvaise habitude de manger la lune, celle-ci avait inventé sa forme en croissant, plus difficile à croquer. Mais aujourd’hui, c’était le quinzième jour du huitième mois, et la lune était ronde. Le crapaud s’en donnait alors à cœur joie de croquer dans la lune.

L’empereur laissa le crapaud à son festin et s’aperçut que plus il avançait plus il s'élevait. Quand, il arriva au palais de la lune. Sur la porte du palais, il était écrit, « Palais de glace doré». L’empereur, proche de son objectif, accéléra son pas, tout en tendant l'oreille. La douce musique revenait. Il avait retrouvé son air de flûte. Mais cette fois-ci, il ne s’arrêta pas et s’avança jusqu’à la porte derrière laquelle venait le son de la flûte. Il entrouvrit la porte et vit un orchestre uniquement composé de jeunes filles danseuses et joueuses de flûte. L’empereur s’arrêta pour écouter cet air qu’il avait eu tant de mal à retrouver.

Il se rappela alors que sur la lune vivait aussi Tchang E, la belle épouse de Hou Yi. L’empereur eut envie de voir Tchang E, d’en apercevoir sa beauté. Il referma doucement la porte de la salle de musique pour ne pas déranger les demoiselles puis, s’aventura plus en avant dans le palais de glace. Quand tout à coup, toutes les bougies s’éteignirent ! Tchang E avait compris l’intention de l’empereur Tang et voulait refouler sa curiosité. L’empereur, toujours aussi peu téméraire, peureux, recula jusqu’à la porte du palais.

La peur le réveilla...

Sur la lune - I

Voici une légende vous permettant de rêver en regardant la lune

A l’époque Tang, il y a plus de 1200 ans, régnait un empereur, Xuanzong. Il entreprenait de nombreuses réformes dans son royaume et après chaque grande affaire, il avait tendance à s'assoupir. Lorsqu’un jour, alors qu’il était endormi, il commença par avoir très froid. Il ouvrit les yeux et voilà qu’il était arrivé en un lieu très calme, où les nuages et le brouillard constituaient le seul paysage. Il s’avança dans ces nuages quand, derrière l’épais brouillard, il aperçut un palais. Il fit encore quelques pas jusqu’à la porte du palais. Sur cette porte, il y avait une inscription : Le palais de glace doré!

Bien sûr, l’empereur Tang Xuanzong connaissait ce palais.
« La palais de glace doré ! Yi ! Mais c’est le palais de la lune ça! Mais alors, cette étrange territoire, serait celui de la lune ? Je suis sur la lune ?»
L’empereur était réjoui. Lui, le grand empereur, pouvait voyager sur la lune. Alors sans plus attendre, il entra dans le palais. Quand un son, une musique lui parvint. Quelqu’un jouait de la flûte. Il suivit le son quand de plus en plus de sons se firent entendre, il n’y avait pas une flûte mais plusieurs instruments. L’empereur, qui lui-même était mélomane, poursuivit son chemin jusqu’à ce qu’il s’arrête.
«Votre majesté, asseyez-vous !» Une jeune fille installa l’empereur sur un trône dans la petite chambre d’argent. L’empereur, fort bien traité jusqu’à présent, observait la scène avec émerveillement, quand une jeune fille le rappela à l’ordre.
« Majesté, qui vous a ainsi permis de perturber ma répétition?» Le roi, choqué, peu habitué à autant de franchise, en fut perturbé et ne put répondre qu’avec autorité, comme il en avait l’habitude : «Mais enfin, mademoiselle, quelle idée de répondre à un empereur. Ne savez-vous pas qui je suis ? Prosternez-vous, je vous l’ordonne ! » La jeune fille, surprise, elle aussi face à autant d’autorité, s’exécuta, mais sans trop savoir comment si prendre. C’est vrai qu’elle n’avait jamais fait ça de sa vie. Se prosterner!»
Quand l’empereur capitula. «Bon allez, sortez d’ici!» Et il chassa la jeune fille de sa chambre argentée là où elle répétait son morceau de musique. Quand le roi sortit de son rêve. Epuisé par cette aventure, il choisit de rentrer se coucher.

vendredi 21 septembre 2007

La légende de la lune - II

L’été passé, c'était déjà le huitième mois de l’année. La lune majestueuse, lumineuse, éclairait la maison des Yang. Les récoltes avaient été bonnes ces dernières semaines et la quantité de coton ne cessait d’augmenter. Ce soir là, le quinzième soir du huitième mois, la mère Yang donna à la petite fileuse 7 kilos de cotons à filer. Tu es agile et tes mains sont petites et rapides. Tiens, te voilà sept kilos à filer pour demain matin. Allez vite !! Ne reste pas là à regarder la lune et mets-toi au travail. »


La jeune fileuse se mit à l’ouvrage. Voilà déjà des heures qu’elle filait le coton, quand la bougie s’éteignit. Plus de cire, elle n’y voyait plus rien et ne pouvait plus filer son coton.
Ainsi la jeune fileuse de coton eut une idée. Elle s’installa dans la cour et commença à filer au clair de lune. La lune était si ronde, ce soir là, qu'elle éclairait beaucoup mieux que la bougie. Sans relâche, elle continuait à filer.
La quatrième veille de la nuit commençait et il lui restait encore une montagne de coton à filer. Alors la jeune fileuse sure de la colère de sa belle-mère à la vue de tout ce coton non filé commença à paniquer. Ses petites mains couraient sur le moulin à filer, et la sueur perlée sur son front. Elle craignait sa belle-mère, et surtout les coups qu’elle lui apposait régulièrement lorsque le travail ne lui convenait pas.

La petite fileuse filait, filait, filait. Son moulin ne cessait de tourner quand le vent se leva.

La jeune fille redressa alors la tête de son métier à tisser, quand elle aperçut… un majestueux dragon volant ! Un dragon avec sur son dos un conseil de vieux sages ! La petite fileuse ne rêvait pas.
Certes harassée par son ouvrage à filer, elle n’avait plus l’esprit clair, mais ce dragon et ces sages venaient bien de la lune pour lui ordonner de se coucher. Elle s’opposa cependant aux vieux sages en leur expliquant qu’elle ne pouvait dormir sans avoir finit son ouvrage, mais les sages avaient déjà disparu. Alors elle se remit à filer. Quand le vent fut si fort qu’elle ne put continuer son ouvrage et rentra dans la demeure.
Malheur, plus de cire pour continuer à filer à l’intérieur et trop de vent pour filer dans la cour. Et son filage n’était pas terminé. Que faire ! Elle serait battue, elle en était certaine et la peur des coups l’empêcha de s’assoupir pendant les quelques heures restantes avant le lever du jour.

Le coq chanta ! Le jour se levait quand la mère Yang était déjà arrivé dans la chambre de la petite fileuse pour faire l’état des travaux.

« Alors, as-tu fini ton ouvrage ? Hmm, je suis sure que tes petites mains n’ont pu terminer les sept kilos à filer. Alors combien en as-tu filé ? Cinq, quatre, trois… » Tu n’es qu’une incapable, autant te battre de suite !»
« Allez montre-moi ton ouvrage. » Et la mère Yang pénétra dans la chambre de la jeune fileuse. Quand au fond de la chambre, sur le sol, était posé un métier à filer tout particulier : il était en or !

De bambou, il était devenu or.

La mère Yang, ravie, observa ce métier à filer, puis adoucit par la couleur dorée du métier, demanda à la jeune fileuse ce qu’elle avait fait la veille. La fileuse confuse et terrifiée lui répondit alors qu’elle avait filé toute la nuit dans la cour, au clair de lune, par manque de cire dans sa chambre. Elle lui raconta aussi sa rencontre avec le dragon et les vieux sages, quand la mère se rappela de la légende. "A la quatrième veille de la nuit, le quinzième jour du huitième mois de l’année, à celui qui aura de la chance apparaîtra les sages sur le dragon. Et tout ce qui tombera du dragon sera de l’or !!"

Ainsi, la mère Yang changea d’attitude et décida de bien la traiter cette jolie petite, si chanceuse, rapporteuse d’or…

La légende de la lune - I



Le quinzième jour du huitième mois de l'année chinoise, tous les habitants en Chine ont pour habitude de regarder la lune et de manger au clair de lune. Parce que ce soir là est un soir tout particulier...


Voici l'histoire de la légende de la lune.

Il était une fois dans la Chine ancienne, une vieille famille de commerçant et de cultivateur de coton, riche, mais réputée pour l’inhospitalité et la sévérité de la maîtresse de maison, la mère Yang. La mère Yang avait donné naissance à un jeune fils qu’elle chérissait plus que tout au monde. Ce fils était sa fierté ! Aussi, lorsqu’une famille du village voisin était venue trouver la mère Yang pour leur vendre leur fille en échange de quelques menues monnaies, la mère Yang, voyant en cette jeune fille non seulement une épouse pour son fils mais aussi une servante idéale, avait accepté de l’acheter.
L’affaire entre les deux familles fut ainsi conclue et le mariage organisé entre son jeune fils de 5ans et cette jeune demoiselle âgée de 13 ans.

« La voilà ! C’est la nouvelle mariée de la famille Yang ! Vive la mariée ! Oh la jolie mariée ! Elle est d’une beauté si délicate, son visage est si fin ! Quel dommage pour cette petite d’être mariée à la famille Yang. Elle va déguster ... » les commentaires et commérages allaient bon train entre les voisins venus assister au mariage pour découvrir la nouvelle servante de la famille Yang.
La cérémonie de mariage fut rapide. Quelques prières aux ancêtres des Yang pour présenter cette nouvelle épouse et la mère Yang arrêta là la cérémonie de mariage. Le temps était de l’argent et la mère Yang expliqua clairement à la jeune demoiselle ce qu’elle attendait de sa belle-fille.

« Jeune fille, tu es une Yang maintenant. Mais être une Yang, ça se mérite. Tu n’es pas ici pour profiter de notre fortune. Vois-tu jeune fille, je t’ai sauvé de la misère, et bien maintenant il va falloir me montrer ce que tu vaux ! Si tu crois que tu es ici pour profiter de la fortune de la famille tu te trompes ! Notre fortune, elle est à nous, les Yang. Toi, tu es là pour travailler ! La journée, tu devras t’occuper de la maison, et à la nuit tombée, lorsque tu auras terminé à la maison, je te donnerai du coton à filer. C’est quelque chose de très aisé. Il te suffira de t’asseoir et de filer, rien de plus simple. Un jeu d’enfant, jeune fille !! Arrête de me regarder comme ça ! Tu n’as pas entendu, tu es là pour travailler, alors au boulot. »
Et voilà comment la jeune fileuse de coton, commença sa nouvelle vie de belle-fille Yang. Le jour, elle s’occupait de la maison, et la soirée, elle filait le coton.

Les jours et les mois passèrent, une année était presque terminée. La jeune fille épuisée, supportait difficilement ce rythme de vie et ses mains étaient engourdies et de plus en plus lentes au filage. Cependant, sous la menace de sa belle-mère, la jeune fille travaillait avec application et ses mains restaient habiles. Ainsi la mère Yang n’hésitait pas à lui en demander toujours plus et désormais n’utilisez plus d’autres serviteurs que sa belle-fille.

vendredi 17 août 2007

La tisserande et le bouvier

En Chine, le septième jour du septième mois de l'année chinoise, c'est la fête de la tisserande et du bouvier. Journée où l'on célèbre leur amour ainsi que tous les amoureux.


Voici la légende de la tisserande et du bouvier


Il était une fois Niu-Lang, le garçon qui vivait avec les vaches. Orphelin, il vivait avec son frère aîné et son épouse. Ceux-ci, déjà très pauvres ne pouvaient parvenir à éduquer le jeune Niu-Lang. Ils l’avaient ainsi dès son plus jeune âge installé avec le bœuf de la maison. C’est ainsi qu’on l’appela Niu-Lang. A sa majorité, son frère aîné et son épouse firent un partage des biens des parents qu’ils jugèrent tous équitable. Niu-Lang aurait le bœuf et son attelage et son frère, le reste.

Niu-Lang fut ainsi renvoyé de la demeure de son frère. Il n’avait plus d’attache. Orphelin, il l’était désormais aussi de frère. Seul son bœuf, son ami fidèle qui l’avait vu grandir, restait à ses côtés.
Alors Niu-Lang s’éloigna de son village natal et marcha jusqu’à ce qu’il trouve une terre. Il l’a trouva près de la montagne. Il y construisit sa maison et laboura sa terre.

Un jour alors qu’il était assoupi à l’ombre d’un rocher, son ami le bœuf, pour la première fois, prit la parole :
« Niu-Lang, écoute moi. Je suis le bœuf céleste, Jin Niuxing. N’ayant pas été fidèle aux lois de notre royaume céleste, j’ai été renvoyé sur terre pour l’éternité. Maintenant, je suis à tes côtés. Ecoute-moi, il faut te marier. Aujourd’hui, tu en as l’opportunité, alors écoute-moi bien et ne perd pas cette occasion incroyable. »
Le bœuf expliqua à Niu-Lang comment se rendre auprès d’un lac au centre de la forêt. Il suivit les paroles de son bœuf et s’y rendit. Sur place, il entendit des chuchotements. Attiré par ses étranges sons, il s’approcha du lac ; quand il découvrit une dizaine de jeunes filles en train de se baigner. Plus loin près du lac, les peignoirs de soie des jeunes filles étaient posés à même le sol. Niu-Lang s’en approcha et en prit un rouge comme le lui avait conseillé son fidèle ami le bœuf. Il attendit alors près du lac et observa les jeunes filles.

Celles-ci discutaient et jouaient avec insouciance, quand tout à coup l’une d’entre elles s’inquiéta :
« Sœurs, il se fait tard, regardez le soleil se coucher. Nous avons quitté le royaume céleste sans prévenir notre mère supérieure, si elle l’apprend, elle nous punira. Vite, rentrons ! »
Et les jeunes filles s’envolèrent vers le ciel, pays du royaume céleste, sauf une.

« Mais où est mon peignoir ! Qui a vu mon peignoir !! » Quand Niu-Lang s’approcha et caché par un buisson, tendit le peignoir rouge qu’il venait de saisir.
« Tiens ! Prends-le ! Je n’ai rien vu. Sois tranquille ! »
Et la jeune fille enfila son peignoir. Puis, elle demanda à Niu-Lang de sortir de son buisson pour se présenter décemment. Alors Niu-Lang s’exécuta et humblement se courba pour lui faire avec toute dignité ses excuses. Il en profita pour se présenter et comme il n’avait jamais parlé à personne, il se présenta d’une manière peu formelle, à sa façon :
« Moi Niu-Lang, orphelin de père et de mère et cadet de deux enfants, a vécu chez son frère pendant des années. N’ayant que pour seul lit la couche du bœuf et pour repas les restes de leur déjeuner et dîner. Me voilà désormais seul avec mon bœuf. »

La jeune fille touchée par cette si triste histoire ne put que le plaindre, puis se présenta à son tour :
« Moi, fille du ciel, Zinu, tisserande de métier, réside sur les beaux nuages. Et tous les nuages lumineux que tu aperçois proviennent de mon métier à tisser. Ma mère, la déesse mère, me demande de tisser jours et nuits. Me voilà enfermée dans cette tisserie depuis des années. Ma prison dorée me détruit. Le royaume céleste me prive de liberté. J’ai désormais envie de vivre sur terre. La déesse mère, justement ivre morte aujourd’hui, j’ai pu saisir l’occasion pour m’en échapper avec mes sœurs. Ah la terre est vraiment merveilleuse, les paysages magnifiques ! »

« Zinu, puisque le royaume céleste ne te convient pas, pourquoi ne resterais-tu pas ici sur notre terre. J’aime la vie et toi aussi, alors vivons heureux, vivons ensemble. Marions-nous et tu n’auras plus besoin de rentrer au royaume céleste. Vivons heureux ensemble ! »
Ils vécurent heureux et eurent deux beaux enfants. Sept années passèrent. Niu-Lang, Zinu et leurs enfants vivaient
heureux en ménage .

Lorsque Zinu commença à s’inquiéter.
« Voilà sept ans de passés sur terre soit sept jours dans le royaume céleste. La déesse mère devrait commencer à vouloir me chercher. »

En effet, la déesse mère, informée de la fuite de sa tisserande, commençait à perdre patience.
« Elle croit qu’elle peut choisir son destin et s’installer au pays des êtres vivants ! Les habitants du royaume céleste restent au royaume céleste, c’est la loi. Il ne le quitte que lorsqu’ils en sont chassés. Jamais je ne l’ai chassée ! Elle me doit de revenir ! Et puisqu’elle ne revient pas, je vais aller la chercher moi-même ! »
Voilà comment la déesse mère se rendit sur terre et déroba Zinu à sa famille pendant un après-midi d’été.

A cette terrible nouvelle, Niu-Lang choisit de suivre Zinu au royaume céleste.
Il embarqua les enfants avec lui et grâce au bœuf, son ami fidèle, Niu-Lang s’envola à la recherche de sa bien aimée. Zinu, la malheureuse, enlevée par la déesse mère, se retrouva bientôt séparé de son mari par un océan de nuage. Et malgré l’aide de son bœuf, il était impossible à Niu-Lang de traverser cette mer de nuages.
Quand tout à coup, des oiseaux, tous venus à l’aide de la tisserande et du bouvier formèrent un pont pour permettre aux deux amants de se retrouver une dernière fois. Zinu put embrasser très fort ses enfants et son époux avant de retourner à son métier à tisser.

Quant à la déesse mère, face à cet attendrissant spectacle, elle décida d’être clémente et de leur accorder un jour de rencontre par an, le même que celui où ils se sont quittés, le septième jour du septième mois de l’année !


vendredi 6 juillet 2007

Le poisson - V

5ème partie


« AH Gong, je n’ai pas oublié tu vois, j’ai rapporté du poisson ! Du Bonito en plus ! » AH Zhang rêvassait. Il imaginait la joyeuse scène de retour à la maison. En chemin, il ne cessait de penser aux gros yeux d’émerveillement que feraient sa sœur et son petit frère en voyant ces deux gros poissons. Quant à son grand-père, il le voyait déjà les baguettes à la main et tout tremblant de joie face à ce délicieux poisson dans son assiette. Et sa joie déborderait quand AH Zhang lui annoncerait : « Ah Gong plus que deux mois et je serai menuisier ! »

Quand tout à coup, « CLAC ! ».

Le vélo avait déraillé. La chaîne pendait et touchait le sol. Ah Zhang sauta à terre. Pris la chaîne dans une main pour la replacer sur le dérailleur. De l’autre main, il prit la pédale qu’il fit tourner dans le sens inverse des aiguilles d’une montre et voilà, la chaîne était en place. Il avait l’habitude, le vélo déraillait sans cesse. Il le savait bien qu’il ne pouvait pas pédaler trop vite, mais perdu dans ses rêves, il en avait oublié sa chaîne. Et voilà, elle avait encore déraillée. Ah Zhang, les mains toutes noires et graisseuses remonta sur son vélo quand il s’aperçut que les feuilles de taro accrochées à son guidon étaient vides. Le poisson était tombé ! Ah Zhang revint sur ses pas, lorsqu’il aperçut son poisson, là à deux kilomètres sur la route, aplati, écrasé par une voiture, son poisson n’était plus qu’une image plutôt flou de bonito. Pauvre Ah Zhang, cela faisait deux heures qu’il pédalait sur ce vélo deux fois trop grand pour lui, sous un soleil de plomb. Un vrai calvaire, et voilà que maintenant son poisson était tombé, réduit en miette. Il n’avait plus la moindre force pour pleurer.

Le poisson - IV

4ème partie


« Fiston viens, viens ici. » Et le grand-père lui aussi fit quelques pas vers AH Zhang. Il se rapprocha et se pencha à son oreille comme pour lui faire une confidence.

« Tu sais il y a une fois, j’ai réussi à vendre beaucoup de pomme de terre. Avec l’argent que j’avais gagné j’ai eu envie d’aller jusqu’au marché pour vous acheter à toi et tes frères et sœurs un poisson. L’autocar n’est pas encore là ? Hein ?»

« Non pas encore » répondit Ah Zhang.

« Bon quand l’autocar arrive tu me préviens hein ! Tu sais le poisson est beaucoup plus cher que les autres plats. Et bien ce jour-là, je me suis avancé vers les stands de poisson. J’ai commencé à regarder les poissons et surtout les têtes des vendeurs. Mais je n’osai pas m’approcher de trop près. Alors j’ai d’abord continué à faire le tour des stands et tu sais pourquoi ? »

« Parce que tu voulais voler du poisson ? »

« Quoi ?! Mais non ! Ca va pas ! Il ne faut jamais faire ça hein, tu m’entends ? Il ne faut jamais voler ! Le car est arrivé ? Tu dois faire attention au car hein ! Quand il arrive tu me le dis d’accord ? »

« Oui, oui, il n’est pas encore arrivé ! »

« Bon et bien tu sais pourquoi ? Parce que les poissonniers se sont tous des voleurs ! Il faut se méfier hein ! Et ce jour-là, il y avait une femme parmi les vendeurs. Je me suis approché de son banc de poisson et j’ai vu qu’elle avait un très beau bonito dans les mains. Et elle criait, ils sont beaux mes poissons ! Très frais ! Pêchés ce matin ! Alors je me suis approché de son stand et lui ai dit de ne pas voler un pauvre vieux monsieur comme moi. Elle a sourit, et sur un ton plutôt honnête et rassurant, elle m’a dit de ne pas m’inquiéter. Alors je lui ai acheté un bon gros bonito ! Elle me l’a emballé et je suis reparti avec le poisson. Et bien, quand je suis arrivé à la maison, il avait diminué de moitié ! »

« Et le bus arrive !! J’ai entendu le bruit du moteur »

Le grand-père se redressa regarda au loin la route « mais ce n’est que le bruit du moteur. On a encore le temps, peut-être que ce n’est qu’une voiture. »

« Tu as dit qu’un sac de pomme de terre équivaut à un poisson de quelques grammes. »

« Eh tu as bien retenu hein ! »

« Eh bien, ces bandits m’ont volé mon argent ! Tous des bandits je te dis. Cette arnaque m’a chagriné pendant des jours et des jours. Et ben tu sais quoi : Jusqu’à maintenant encore je n’ose pas aller au marché de poisson. » Et le grand-père souffla : « pfff, les gens de la montagne n’ont vraiment pas de chance, ils ne peuvent vraiment pas manger de poisson. »

« Et le bus arrive ! Bon j’y vais. » Ah gong plissa les yeux et essaya d’apercevoir le bus. « Bon allez, vas-y vite ! AH Gong ne t’accompagne pas hein, tu y vas tout seul, moi je vais me reposer ici. » continua Ah Gong.

« J’y vais papi. »

Et Ah Gong pour la dernière fois : « et n’oublie pas, hein.. ; »

« Oui de rapporter un poisson je sais ! » Et Ah Zhang partit en riant.

Le poisson - III

3ème partie


AH Zhang et Ah Gong aperçurent enfin l’arrêt de bus de Pitou. Ils marchèrent en silence jusqu’à l’arrêt de bus. Lorsque le vieillard s’arrêta soudainement et demanda :

« Tu manges à ta faim au moins? Ca va ? »

Mais Ah Zhang ne répondit pas.

« Ils te frappent là-bas ? » continua à demander le vieillard.

Et Ah Zhang refusait toujours de répondre.

« Quoi ? Qu’est-ce qui t’arrive ? Tu as perdu ta langue ? »

AH Zhang, tête baissée, laissa couler quelques larmes.

« Mais ne pleure pas. Tu vas devenir un menuisier, c’est bien non ? Il n’y a pas de quoi pleurer. »

Ah Zhang hocha la tête et s’essuya les yeux avec sa manche. « Je ne pleure pas ! » Mais pourtant il ne redressa pas la tête.

« Ah j’oubliais. Tiens ! Prends ces quelques pommes de terre tu les donneras à ton maître d’apprentissage. Comme ça, ils seront peut-être plus gentils avec toi. »

« Non c’est bon ! »

« Prends les, c’est mieux comme ça. » Et son grand-père, Ah Gong, fit glisser le sac de pomme de terre qu’il portait sur l’épaule pour le remettre à Ah Zhang son petit-fils. « Ah ! et n’oublie pas de rapporter le sac hein ! »

« Non c’est bon. Je ne veux pas leur donner ça, ils vont se moquer de moi. »

« Quoi se moquer de toi ? Mais pourquoi ? Ce sont les meilleures pommes de terre de la montagne. »

Ah Zhang, releva alors la tête, les yeux toujours rougis par les larmes et acquiesça.

« Bon d’accord ! » finit par accepter le grand-père. « Tu as raison, je préfère encore donner les meilleures des pommes de terre à mes cochons, qu’à ceux qui osent toucher ne serait-ce qu’un seul cheveux de mon fils. »

« AH Gong, il est tard maintenant. Ce n’est pas la peine de m’accompagner jusqu’à l’arrêt de bus. » « Rentre. C’est mieux. »

« Bon d’accord, je vais rentrer. Mais je vais rester ici un peu pour me reposer d’abord. Ne t’occupe pas de moi, va vite à l’arrêt attendre le bus. »

L’enfant tourna le dos au grand-père et s’éloigna lentement jusqu’à ce que son grand-père l’interpelle : « Et AH Zhang, tu es sûr ? Tu ne veux pas apporter les pommes de terre ? »

« Non je ne veux pas. »

« Bon, tant pis. Et peut-être que la prochaine fois que tu rentreras, ils t’offriront un poisson pour que tu le rapportes à la maison. »

« Oui ne t’inquiète pas, je rapporterai un poisson à la maison. »

vendredi 29 juin 2007

Le Poisson - II

2ème partie

Ah Zhang se rappelait très bien de la dernière conversation avec son grand-père avant de rentrer chez son maître d’apprentissage.

« Ah Zhang, la prochaine fois que tu rentres à la maison, rapporte un poisson à la maison, ce serait bien. Ici à la montagne on n’en mange jamais. Toi tu vas au bord de la mer, tu pourras nous rapporter un bon gros poisson !! » lui avait dit son grand-père.

« La prochaine fois que je rentre ! Mais je ne sais même pas quand ce sera ! »

« Ben c’est pour ça que j’ai dit quand tu rentreras »

« Ben ça, ça dépend de mon maître. C’est pas moi qui décide. Et puis quand je rentrerais, heu ce n’est pas sûr que j’ai de l’argent hein ! C’est le patron qui décide ça aussi ! »

« Ben oui, c’est ce que j’ai dit ! Tu rapporteras un poisson à la maison quand tu auras de l’argent et quand tu pourras rentrer ! Et ton patron il te donne de l’argent quand ? » avait demandé son grand-père.

« Ben, c’est toi-même qui me l’a dit quand tu m’as emmené là-bas. Il faut d’abord que je sois apprentis pendant 3 ans et 4 mois pour avoir de l’argent. »

« Oui oui c’est vrai. Tu es là-bas pour apprendre la menuiserie. Il te faut encore combien de temps pour apprendre à faire une table ? »

« Faire une table. A ça, c’est pas facile, mais ça fait déjà longtemps que je sais faire ! » avait répondu fièrement Ah zhang.

« Ben alors, pourquoi tu apprends encore là-bas ! »

« Ben les 3ans et 4 mois de l’apprentissage ne sont pas terminés. »

« oh oh ! Tu y es depuis combien de temps déjà ? »

« Il me reste encore un an et demi ! Pftttt, j’ai l’impression que cet apprentissage n’en finira jamais ! » souffla Ah Zhang.

Mais son grand-père tout de suite réagit à cette exclamation :

« Hé ! Les jeunes ne devraient pas souffler comme ça ! »

« Ah bon pourquoi ? »

« Ben c’est comme ça ! Hmmm, ça porte malheur voilà » lui dit son grand-père. Mais Ah Zhang, la tête baissée, le regard levé vers son grand-père : « Ha Gong ! »

« Hein ! »

« Et quand on est très triste on ne peut pas souffler non plus ? Parce que souffler dans ces cas là c’est très agréable ! »

« Ahahah » soudainement Ah gong se mit à rire.

« Ben quoi qu’est-ce qu’il y a de si drôle ? »

« Je n’avais pas remarqué que tu avais déjà grandi. Tu parles comme un grand maintenant ! Et eheh fait attention ! Ne te penche pas trop vers là, tu pourrais tomber. C’est très profond de ce côté-là et les bambous finiraient de te blesser si tu tombais dans ce ravin ! »

« Ah gong tu vas jusqu’où comme ça ? »

« Ben nulle part, je t’accompagne jusqu’au bus, c’est tout ! »

« Ne t’inquiète pas, je ferai attention, je peux très bien y aller tout seul ! Et puis la prochaine fois, je rapporterai un poisson c’est promis ! » Ah Zhang et Ah gong avançaient ainsi jusqu’à l’arrêt de bus entrecoupant parfois leur chemin par quelques bribes de discussions. Arrivé à un tunnel, Ah gong laissa passer Ah Zhang le premier et le suivit. Le silence régnait dans ce tunnel très sombre, quand Ah Gond demanda à son petit-fils :

« Ca va ? C’est pas trop dur le boulot ? »

« Ben heum heum ! c’est dur mais c’est comme ça ! Y’a rien à faire. Le patron me donne tout à faire, même les couches du bébé c’est moi qui les change alors ! »

« Quoi et la femme du patron qu’est-ce qu’elle fait ? Rien ? Mais ne t’inquiète pas ! Patiente un peu, c’est presque terminé ! »

« Ben oui. Ca tu me l’as déjà dit ! »

« Hein n’est-ce pas ! Il faut supporter. C’est comme ça. Soit patient et tu feras un bon exemple pour ton petit frère et ta petite sœur. »

Mais Ah Zhang n’écoutait déjà plus les recommandations de son grand-père entendues déjà maintes et maintes fois. Il observait les chèvres dans le champ. Elles étaient à eux. C’était leurs chèvres ! Quand il demanda :

« Et nos chèvres elles vont bien ? »

« Et oui, pas mal ! Elles vont bien ! »

« Ben il faudrait en élever plus non ? »

« Oui j’y ai déjà pensé » confia son grand-père.

« Si on en élève plus, on aura encore plus de petits chevreaux »

« Oui tu as raison, j’y avais déjà pensé »

« Ben oui depuis le temps qu’on n’en a que trois ! » s’exclama Ah Zhang.

« Et en plus que des mâles ».

« Les mâles ne servent à rien. »

« Ben si ce n’est que des femelles ce n’est pas mieux hein ! »

« Ben j’avais pensé que si on avait plus de chèvres et des chevreaux on pourrait les vendre et alors acheter des outils de menuiserie avec cet argent. » Et tout en parlant, Ah Zhang se pencha pour arracher une brindille qu’il mit entre ses dents.

« Et fait attention tu vas te couper, c’est dangereux ça ! ». Puis Ah Gong revint immédiatement à leur conversation :

« Parce que tu veux un outil de menuiserie ? »

« Ben oui. Tu sais grand-père je ne sais pas que faire des tables. Je sais aussi faire des étagères, des coffres, des lits, des armoires ! J’ai déjà tout fait. »

Et Ah Gong heureux de cette bonne nouvelle : « Et bien alors on t’achètera un bel atelier ! avec l’argent des chèvres ! c’est promis ! »

« Quand » s’inquiéta Ah Zhang.

« Oh la, ne sois pas si pressé ! Ne t’inquiète pas on te l’achètera ton atelier. Je vais aller de ce pas échanger deux boucs contre une chèvre. Et avec un mâle et une femelle on pourra commencer tout de suite à faire des chevreaux. »

« Ben il faut te dépêcher hein, parce que je suis presque un menuisier maintenant ! »

« Bon c’est bien, mais n’oublie pas que parce que tu as presque fini, même si c’est dur tu dois le supporter d’accord ? »

« Oui d’accord ! » répondit Ah Zhang quand ils aperçurent enfin l’arrêt de bus de Pitou. Et ils marchèrent en silence jusqu’à l’arrêt de bus.

Le Poisson, d'après la nouvelle de Huang Chun-Ming


Voici la première partie de l'histoire Poisson, d'après la nouvelle de Huang Chun-Ming.

« Ah Gong, Ah Gong, tu m’avais dit de rapporter un poisson n’est-ce pas ? Et bien ça y est, je l’ai rapporté. Un joli poisson, un bonito ! » se répétait à lui même le jeune Ah Zhang perché, redressé très droit sur sa vieille bicyclette rapporté d’outre tombe ! Il était fier, il conduisait une bicyclette ! Elle était grande, seul un adulte, un homme, un vrai pouvait monter sur cette bicyclette et y atteindre les pédales, et lui enfin, Ah Zhang pouvait la conduire ! Il était assez grand désormais. Au début, quand il avait sortit la bicyclette de son cimetière il s’était installé sous le cadran, de là, courbé un peu, il pouvait pédaler sans difficulté, mais il était grand désormais s’était-il fait remarquer à lui-même, il pouvait la conduire comme les grands maintenant, assis sur la selle, il devrait bien atteindre les pédales. Alors il s’était perché sur cette selle au-dessus du cadran et cahin-caha, tantôt penché à gauche, tantôt à droite, il conduisait sa bicyclette. Sur son vélo, il avait aussi accroché les bonitos tout frais rapportés du marché. Ceux-ci enveloppé dans des feuilles de tarot il les avait fixés sur les poignées du guidon. Fier de sa trouvaille, il conduisait son vélo bringuebalant tout droit vers sa destination, la maison de son grand-père ! Ah oui il serait content son grand-père de le revoir ! Il avait rapporté les bonitos, du poisson. Il avait rapporté du poisson à la montagne pour sa famille. Grand-père, petit frère et petite sœur ils seraient tous aux anges, ils pourraient manger du poisson !! Et en plus, ils verraient que Ah Zhang avait un vélo, un vrai vélo d’adulte ! Il avait grandi ! Avec ce vélo il pourrait économiser les 12 sous du bus qu’il lui fallait dépenser pour rentrer chez lui, à Pitou dans la montagne. Cette bicyclette, il l’avait récupérée chez la famille qui l’employait comme apprentis. Elle était vieille, personne ne la voulait alors il l’avait empruntée pour rentrer chez lui.

Sur le chemin de la maison, Ah Zhang ne réfléchissait à rien, il était heureux, il ne pensait qu’à la joie de son grand-père à la vue du poisson. Même les couinements et grincements douloureux de la vieille bicyclette ne pouvaient le sortir de son rêve. Il se voyait déjà sur le porche de la maison, les deux poissons dans les mains les bras levés vers son grand-père et face à ce dernier ébahi devant les deux poissons de son petit-fils, lui disant :

« Ben quoi ? Je n’aurai quand même pas oublié ! J’ai rapporté du poisson !! »

...

vendredi 22 juin 2007

La légende du serpent blanc - II

Ayant repris forme humaine peu de temps après, Bai Suzhan décida de sauver Xuxian. Il fallait le ramener à la vie. Les serpents blancs et azur connaissaient la plante qui rendait immortelle de la montagne des immortels. Ils savaient aussi que seul le vieux sage des montagnes pouvait leur donner. Mais Suzhan, le serpent blanc, choisit d’outrepasser les règles. Son mari, son bien-aimé mourait. Il lui fallait trouver au plus vite cette plante immortelle. Elle partit l’arracher elle-même. Et son mari, Xuxian, put revenir à la vie.
A son réveil, après son long voyage parmi les morts, , Xuxian avait fait son choix. Serpent ou femme, il aimait Suzhan, il aimait sa bonté, sa sagesse envers lui. Et non, il ne pouvait la quitter. Ils étaient mari et femme, et cela pour la vie.

Leur choix fut bien sûr contesté et le bonze Fahai revint chercher Xuxian.

Xuxian avait outrepassé les règles. Il avait sauvé un serpent de mauvais augure, il cohabitait avec cette créature. Il fallait éduquer Xuxian. Il lui fallait apprendre les préceptes de la vie selon le cycle de la vie. Pour cela, Fahai enferma Xuxian. Celui-ci enfermé, il pourrait enfin réfléchir à son destin et briser son cycle de vie déjà si mal commencé.
Emprisonné, Xuxian était anéanti. Pourquoi cette décision si injuste ? Il aimait sa femme et il vivait avec elle, quoi de plus noble ? Pourquoi lui fallait-il changer sa vie ? Sa vie était la plus parfaite de toutes les vies. Il vivait avec la personne de son choix, avec la personne de son cœur.
« Relâchez-moi !! criait-il à longueur de journée. Votre paradis céleste ne m’intéresse pas. J’aime ma vie ainsi, avec ma femme, ma tendre épouse. Mon paradis, c’est sur cette terre, auprès de ma femme ! » Hélas la colère de Xuxian fut vaine.

De son côté, Suzhan, elle non plus, n’avait pas abandonné son époux. Celui-ci vivant, elle voulait désormais le libérer. Alors décidée, elle partit affronter le bonze Fahai.
Et face au bonze, elle le menaça :
« Fahai, libère mon mari. Tes menaces et ton comportement ne mène nulle part. Xuxian est en moi désormais ! Il est dans mon ventre !! Je porte son fils!! Libère-le !! » ordonna Suzhan déjà armé d’un long sabre et prête à se lancer contre le bonze.

« Il faudra d’abord m’affronter ! »

Alors Suzhan fit appel à la mer, à la mer de l’est et pria le dragon de lui prêter sa mer. Les vagues se soulevèrent pour recouvrirent toute la région de Hangzhou.
Cependant, le bonze était un maître en attaque. Il savait comment contrer cette terrible mer et la repoussa. Leur combat fut terrible jusqu’à ce que Suzhan, épuisée, se fit prendre par les gardiens du ciel des immortels. Ces derniers, envoyés par la mère du roi céleste, avaient pour mission de capturer ce citoyen du ciel irrespectueux. Il avait franchi le mur des relations entre mortels et immortels. Il fallait arrêter ce serpent blanc. Fahai, soucieux de l’enfant en Suzhan, pria cependant la mère céleste de libérer Bai Suzhan, le serpent blanc. Il lui fallait d’abord donner naissance. Une vie était en elle.

Quelques mois plus tard, le fils de Bai Suzhan et Xuxian naquit. Mais hélas, ce petit être ne put connaître sa maman. Aussitôt naissance donnée, le bonze Fahai revint à Hangzhou capturer le serpent blanc, Bai Suzhan.
Elle fut enfermée dans la pagode de Hangzhou par un sortilège. Celui-ci devait se dissiper lorsque les fleurs pousseraient sur la colonne de bronze à l’entrée de la pagode.

Les jours passèrent, les ans passèrent et le fils du couple interdit grandit. A 18 ans, il devint administrateur du royaume. Il avait réussi son examen. Xuxian et son fils célébrèrent ensemble cette réussite. Pour cela, ils se rendirent à la pagode de Hangzhou où résidait sa mère, Bai Suzhan. Ce jour-là, le 5ème jour du 5ème mois il faisait une chaleur terrible, un soleil immense brillait au-dessus de la pagode de Hangzhou, si bien que des fleurs apparurent sur le bronze de l’entrée. Et c’est ainsi que Bai Suzhan sortit de la pagode. Libérée, elle put enfin revoir son fils et son époux bien-aimé, avant de repartir très haut dans le ciel, dans la montagne des immortels d’où elle provenait !



La légende du serpent blanc - I

D’après la légende, au pays des immortels vivaient deux serpents, l’un blanc et l’autre azur. Ils s’essayaient chaque jour à imiter les humains et à prendre leur apparence. Et le jour où ils réussirent parfaitement à leur ressembler, ils décidèrent de descendre au pays des mortels pour faire leur connaissance. Pour cela, ils prirent l’apparence de deux belles jeunes femmes, Bai Suzhan et sa sœur aînée, puis descendirent sur terre, dans la région de Hangzhou.

Ce jour-là, dans la région de Hangzhou, les habitants célébraient tous leurs morts et leurs ancêtres. Un des notables de la région, Xuxian, comme tous les habitants, souhaitait se rendre auprès du tombeau de ses ancêtres pour leur faire des offrandes. Ainsi, il devait se rendre dans son village natal. Il pria un aimable pêcheur de le prendre sur sa modeste embarcation et de le conduire jusqu’à chez lui. Le chemin jusqu’au village de Xuxian était assez long, il leur fallait passer plusieurs ports avant d’y arriver. Quand leur traversée fut égayée par deux charmantes jeunes femmes, Bai Suzhan et sa soeur :
« Maître pêcheur, auriez-vous deux petites places sur votre barque ? » demanda Bai suzhan. Le pêcheur embarrassé ne pouvait décider. Son client était le jeune seigneur. La décision appartenait à son client. Le jeune seigneur à la vue de ces deux charmantes demoiselles ne put qu’accepter. Les demoiselles montèrent à l’arrière de la barque, et s’assirent sous l’abri de bambous, confectionné par le pêcheur. Quand au jeune Xuxian, comme le voulait la bienséance, il s’éloigna des deux demoiselles et s’assit à l’avant du bateau près du pêcheur.

Les deux jeunes demoiselles, à la vue de ce seigneur si prévenant, choisirent de le mettre à l’épreuve. L’aînée des deux sœurs proposa à Suzhan de faire tomber la pluie. Juste pour voir, si ce jeune homme résisterait à la tentation de s’asseoir à leur côté.
Le pouvoir des serpents immortels est grand et les deux serpents devenus ces deux jeunes demoiselles pouvaient ordonner la pluie et le beau temps. C’est ainsi que tout à coup, la pluie tomba. Des trombes d’eau !! Mais Xuxian, imperturbable, ouvrit son parapluie, et debout sous la pluie resta droit sur la barque. Enfin, il arriva à bon port. La pluie était forte. Par égard pour ces deux jeunes femmes, Xuxian choisit de leur laisser son parapluie avant de partir.
Quelques jours plus tard, Bai Suzhan rendit visite à ce charmant seigneur afin de lui rendre son parapluie. C’est ainsi que les deux jeunes gens devinrent complices, puis que leur complicité se transforma en un heureux mariage !

Quelques mois plus tard, alors que Xuxian vivait des jours heureux avec sa charmante jeune épouse, il fit une étrange rencontre. Sur la place du marché, un bonze le suivait. Soudain, il interpella Xuxian. « Maître, écoutez-moi. Je me dois de vous informer d’une affaire hautement importante. Peut-être ne me croirez-vous pas. Mais, voilà, il s’agit de votre femme. Votre bien-aimée n’est en fait qu’un jeune serpent ensorceleur, capable des plus mauvais tours. Il a pris forme humaine et il est désormais votre femme. Croyez-moi, quittez votre épouse au plus vite, avant que malheur ne vous arrive. Demain, le 5ème jour du 5ème mois, nous boirons le vin de Xiong Huang, immunisant contre les piqûres d’insectes et de venin. Vous en donnerez à boire à votre épouse. Elle redeviendra alors serpent. A ce moment, surtout vous courrez me chercher, moi Fahai à la montagne dorée. Je vous y attendrai. »

Xuxian bien sûr ne crut pas un instant ce vieux bonze de mauvais augures. Mais il prit quand même, comme les habitants de Hangzhou en avaient l’habitude, une bouteille de vin de xiong huang. Le lendemain, à l’arrivée de l’été et des insectes, pour se protéger comme à l’accoutumée des piqûres d’insectes, Xuxian et sa femme Bai Suzhan burent le vin jaune. Quand peu de temps après, Suzhan se sentit faible. Elle se retira alors dans sa chambre. Xuxian inquiet courut dans la chambre de son épouse et y trouva non pas sa jolie jeune femme mais un serpent ! Un grand serpent blanc argenté portant les vêtements de sa femme. Xuxian ne put en supporter davantage et son cœur s’arrêta. Xuxian tomba. De stupeur, il était mort.


vendredi 15 juin 2007

L'histoire de Chu Yuan, illustre lettré.

Dans la culture chinoise, la fête de Duan Wu Jie célèbre le poète Chu Yuan, suicidé pour l'honneur de sa patrie.
Voici son histoire

Chu Yuan, célèbre lettré, vivait à l’époque des Royaumes combattants dans le royaume de Chu. Cet érudit était un des vassaux les plus fidèles du roi Huai Chu. En effet, par ses sages conseils, Chu Yuan avait permis au roi d’apaiser son royaume et d’y apporter enfin la stabilité nécessaire à son développement. La confiance du roi pour son fidèle vassal Chu Yuan était alors sans limite. Cependant, la position privilégiée de Chu Yuan n’était pas appréciée par tous les sujets du royaume et tous les feudataires, briguant cette place si respectée de conseiller du roi, rivalisaient de médisances à l’égard de Chu Yuan dans l’espoir de devenir favoris à leur tour. Ainsi l’un des hauts conseillers du roi entreprit de mettre fin à cette relation de confiance entre le roi et son conseiller Chu Yuan. Un jour, il s’adressa au roi :

« Votre Majesté, moi, votre conseiller feudataire, permettez-moi d’exercer mon devoir et ainsi de vous entretenir d’un sujet qui me préoccupe beaucoup. Dans votre royaume, Majesté, vous n’êtes pas sans ignorer la popularité sans borne de votre conseiller Chu Yuan. Et bien, il semblerait que son dévouement pour son royaume soit connu de tous par delà le royaume de Chu. Si bien que la politique et le gouvernement si éclairés de votre Majesté soient passés inaperçus dans le royaume. Et ce d’autant plus que votre sage et fidèle conseiller Chu Yuan ne cesse de se vanter à travers tout le royaume de ses exploits et conseils. »

Ces quelques paroles suffirent à troubler le roi et c’est ainsi que le roi de Chu commença à se méfier des conseils de son fidèle parmi les fidèles, le lettré et sage Chu Yuan.

Quelques temps après, la guerre reprit au royaume de Chu. Le royaume de Qin, avide de conquête, ne tarda pas à déclarer la guerre au royaume de Chu.
Le royaume de Qin commença par aborder le roi de Chu par une fourbe stratégie. Ainsi, il proposa au roi de Chu une alliance qui serait conclue entre les deux royaumes de Chu et de Qin à Wuguan. Un rouleau fut apporté au roi de Chu par un messager du royaume de Qin. Son rouleau en main, le roi de Chu, Huai, prit cette alliance au sérieux. Ce geste de civilité et d’humanisme suffit à satisfaire le roi pour accepter cette alliance et préparer son armée à se rendre à ce rendez-vous.
Un grand conseil général fut décrété par le roi, afin de préparer son armée et cette alliance. Le conseil commença d’abord par les explications du roi, puis il donna la parole à ses conseillers. Après l’état des lieux de la situation, Chu Yuan, incrédule face à cette offre si généreuse du royaume de Qin, intervint sans attendre auprès du roi.
« Votre Majesté, si vous me le permettez, je désirerais intervenir. Votre altesse, il est évident que cette alliance n’est qu’un leurre de la part du roi de Qin. Quel serait le bénéfice de cette alliance pour le royaume de Qin et notre royaume. Le roi de Qin est un tigre aux longues griffes et aux dents de loup. Votre majesté, il me semble que la sagesse nous recommande de ne pas accepter cette alliance. Ne répondons pas et préparons nous à son attaque».

« Votre Majesté» intervint alors un autre conseiller du roi. « Permettez-moi de vous présenter mon idée sur cette alliance. Voilà, nous, le royaume de Chu ne devons-nous pas surpasser les méfiances et les préjugés sur le royaume de Qin. Cette alliance, ne serait-elle pas plutôt un signe de paix. Il me semble que le royaume de Qin nous fait signe, ne devons-nous pas au contraire accepter cette alliance ? Votre majesté, croyez-moi, nous ne pouvons refuser ce rendez-vous. »

« Votre Majesté », intervinrent alors les autres conseillers, tous près à contredire les propos de Chu Yuan. Votre sage conseiller Zilan a, me semble-t-il, raison. Acceptons cette alliance. Allons à Wuguan. »
Et c’est ainsi que l’armée de Chu se rendit à Wuguan où elle fut encerclée par l’armée ennemie. Le roi Huai Chu fut emprisonné et condamné à mort. Son successeur, sous les recommandations des anciens conseillers du roi de Chu, déclara Chu Yuan, grand et fidèle conseiller du roi, comme responsable de ce terrible échec du royaume de Chu. Chu Yuan fut alors exilé par le roi de Chu, le grand QinNang.

Chu Yuan rentra dans son pays natal pour vivre aux côtés de sa soeur.

Ainsi CHu Yuan était désormais installé dans une vie de recueillement, de réflexion et de tristesse. Envahi par un immense chagrin, il composa les célèbres rouleaux de bambous, intitulés « tristesse de l’éloignement ». Il ne pouvait oublier son royaume, le royaume de Chu et son roi, mort par les mauvais conseils de ses conseillers. Toujours inquiet pour son pays, jour et nuit, Chu Yuan ne cessait de composer sur les meilleures façons d’agir et la nostalgie de son royaume, le royaume de Chu. Son chagrin était de plus en plus lourd. Quand un jour, la nouvelle lui parvint. Le royaume de Chu était conquis. La capitale était prise par le royaume de Qin !
Chu Yuan s’effondra ! Tout était fini. Sa vie, il avait tout donné pour son royaume, mais en vain. Il était conquis. Sa tristesse fut infinie jusqu’à devenir insupportable. Il ne dormait ni ne mangeait plus.
Lorsqu’un matin, il se redressa. Droit, debout, les joues sèches, entaillées les larmes des jours passés, il demanda à sa servante de lui préparer des vêtements propres. Il sortait.
Il prit son cheval, calmement et s’avança vers la rive du fleuve Milo.

« Chu Yuan te voilà sur la rive du changement. Le monde dans lequel tu vis est de plus en plus impur et bourbeux. Moi, Chu Yuan, solitaire en ce monde sali par ses sujets, il me faut désormais aller de l’avant. Je dois surpasser ce monde. J’ai choisi. Je vais quitter cette fausse pourrie, ce monde impur.
Pourquoi ne pas essayer les mondes sous-marin ?! » Et il sauta.
Chu Yuan se noya dans la rivière Milo, effondré par le désastre du gouvernement de son nouveau roi.

La nouvelle se répandit très vite. Chu Yuan, l’éminent poète et conseiller du roi s’était noyé.
Les habitants de son village natal, tous respectueux envers cet homme illustre, montèrent sur leur barque et commencèrent affolés à chercher Chu Yuan. Sans résultats, ils choisirent alors d’alerter Chu Yuan de leur présence par des tambourinages. Leur gong embarqué, tous ensemble, ils jouèrent. Les gongs sonnèrent, résonnèrent dans les eaux profondes du fleuve Milo ce jour-là. Mais en vain. Chu Yuan ne revint pas. Il avait choisi de quitter ce monde. Aussi, afin de protéger Chu Yuan des prédateurs sous-marins, les habitants lancèrent des boules de riz gluant aux poissons. Ceux-ci repus ne mangeraient pas le corps de Chu Yuan.

Et c’est ainsi que cette pratique, comme celle du gong, furent renouvelées tous les ans pour commémorer la perte si grande de l’illustre Chu Yuan.

Aujourd’hui encore, pour la fête de Duan Wu Jie, en l’honneur du poète Chu Yuan, il est possible de manger des Zhongzi, boulettes de riz gluant, enveloppées dans une feuille de palmier.

vendredi 1 juin 2007

L'enfance de Mencius

En Chine, la mère de Mengzi, le grand philosophe chinois (Mencius de son nom latin) est un modèle. Par son éducation exceptionnelle, son fils a pu devenir un grand philosophe. Et actuellement encore, les jeunes parents chinois ont tous en mémoire l'histoire de Mengzi et de sa mère. Un modèle que tout le monde essaye d'imiter.
Voici, cette histoire.

Mengzi est né en Chine, au IV° siècle avant J-C, à l’époque des royaumes combattants. Son père, Mengji, un lettré plutôt malchanceux, fonctionnaire auprès du roi du royaume de Song, vécut dans la prospérité. Jusqu’au jour où, hélas, trois ans plus tard, il décéda. Il laissa sa femme, mademoiselle Qiu et son fils unique, le petit Mengzi à leur propre destin.

Mademoiselle Qiu, femme du mandarin Mengji, mère du petit Mengzi vivait dans la principauté de Tsou, (le Shandong actuel), au pied de la montagne Maan, dans un petit village nommé Fan.
Dans ce village, la vie y était paisible. La mère de Mengzi, seule, y élevait son fils. Ce dernier aimait jouer avec ses voisins, les autres enfants du village et tous ensemble s’amusaient souvent à imiter les adultes de leur entourage. A proximité de ce village, était justement un cimetière. Ce cimetière, un des plus grands de la principauté de Tsou, avait régulièrement de nouveaux locataires en ces temps difficiles et les jeunes enfants du village aimaient à regarder les fossoyeurs à l’ouvrage et les défilés endeuillés. Mengzi, quant à lui, était aux premières loges pour voir ce cortège funéraire, puisque les défilés passaient régulièrement devant sa porte.
Ce défilé de personnes vêtues de chanvre, en pleurs, se lamentant à n’en plus finir, était un spectacle très divertissant pour le petit Mengzi et ses amis. Les enfants du village se plaisaient à les imiter et avaient pour habitude de jouer aux enterrements. Les uns se taillaient des vêtements de chanvre, d’autres creusaient pour la mise en bière, d’autres encore brûlaient du papier monnaie, ou simulaient le transport du cercueil. Un jour, alors que tous les enfants du village étaient en train de jouer près du cimetière, la mère de Mengzi entendu son fils pleurer et crier. D’abord indistinctes, les paroles de Mengzi devinrent plus claires.
« Mon amour, pourquoi tu m’as laissé ? Te voilà parti maintenant, il ne reste que moi en ce bas monde ! Que vais-je faire ? Que vais-je devenir ? »
Mademoiselle Qiu se rapprocha de la voix qu’elle supposait être celle de son fils, quand elle l’aperçut, agenouillé à terre, les bras tantôt en l’air, tantôt frappant la terre avec vigueur, criant, voir même braillant pour être sûr de transmettre toute la tristesse d’un enterrement à ses amis. Il jouait à l’enterrement. Il fallait être triste et pleurer. Ce que Mengzi fit très bien, si bien que sa mère, paniquée de voir à quel genre de jeu son fils s’amusait, décida de déménager sur le champ.
Elle prépara ses bagages et empoigna son fils. Ils partirent.

Leur pas les menèrent jusqu’au village de Miaohuying. Cette fois-ci, mademoiselle Qiu, pour le bien de son fils, s’installa au centre du village. Dans une rue commerçante, très animée, où là, au moins, son fils ne jouerait pas à des jeux aussi macabres que la reconstitution d’un enterrement.
La rue animée éveilla Mengzi. Ses amis ne se lamentaient plus, ne pleuraient pas et lui ne s’agenouillait plus en criant. Mengzi, comme tous les enfants, observait son entourage. Un boucher à gauche, un marchand de légumes à droite et divers autres commerces dans la rue. Tous les jours, le jeune garçon traînait avec ses camarades et apprenait.
Et c’est ainsi qu'il observa le boucher couper du porc, les commerçants marchander et les vendeuses attirer le client à la criée. Il prit ainsi exemple sur ses voisins.
Sa mère fut alors très étonné de voir un jour son fils, jouer au marchand de viande. Imitant l’abattage du porc, puis la découpe de celui-ci et enfin ventant avec joie tous les mérites de son porc, très frais "et oui mesdames et messieurs", très frais!
Mademoiselle Qiu ne put en supporter davantage et se dit qu’il valait mieux déménager et trouver enfin un environnement plus propice à l’épanouissement et à l’éducation de son fils. Lui qui imitait si bien son entourage, il fallait lui donner un voisinage constructif. Et pas plus qu’elle ne voulait laisser son fils proche d’un cimetière, elle choisit aussi d’éloigner son fils du milieu commerçant et des petits marchandages incessants auxquels ils se livraient.

La mère de Mengzi choisit de s’installer près de l’école de la principauté de Tsou. Ici au moins, entouré d’étudiants et de sages lettrés, le jeune Mengzi serait influencé correctement pensa-t-elle. Dans tout le village, on pouvait entendre les récitations des élèves. Les lettrés de l’école et leur sagesse impressionnaient les enfants du village. Ainsi, Mengzi, avec les enfants du village, joua à étudier. Assis sous un arbre, il se courbait au-dessus d’un rouleau reconstitué à partir de brindilles et récitait ce qu’il avait appris en écoutant les élèves faire leur récitation. Avec ses camarades, ils jouaient aux discussions entre lettrés, se courbant tous aimablement les uns devant les autres, se faisant des politesses avant de s’asseoir et de s’attabler devant une tasse de thé invisible. Observant les jeux de son fils, la maman de Mengzi fut ravie. Après un long parcours, elle avait enfin trouvé un environnement favorable à son fils. Elle choisit de rester dans ce village et se mit à tisser pour gagner sa vie et permettre à Mengzi, son fils unique et orphelin de père, d’avoir la meilleure des éducations.

Hélas, Mengzi n’était qu’un enfant. Et ce qui était un environnement des plus favorables pour sa mère, n’était aux yeux de Mengzi qu’un village comme les autres où les enfants ensemble se réunissaient pour jouer. Aussi, alors que Mengzi avait déjà commencé à étudier, il fut surpris un jour par sa mère en train de s'amuser avec ses amis au pied d’un arbre plutôt que d’être sagement à l’école.
Cependant, plutôt que de le gronder immédiatement, la mère de Mengzi rentra chez elle. Toujours à son ouvrage à tisser, elle attendit la rentrée de son fils. Lorsque celui-ci rentra et s'installa à côté d’elle pour l'aider à tisser, elle prit une paire ciseaux et coupa en deux tout le morceau de tissu qu’elle avait laborieusement tissé. Toute une semaine de labeur anéantie. Face à cet étrange spectacle, Mengzi ne put que réagir.
« Mais maman, pourquoi détruisez-vous de vous-même ce magnifique tissu, tissé de vos mains? C’est de la folie ? Il vous a fallu une semaine de travaille sans relâche pour le finir. »
Et mademoiselle Qiu, répliqua alors : « Mon fils, tu es allé jouer avec tes amis cet après-midi plutôt que d’aller à l’école. Et bien, ton action est toute aussi inconsidérée que la mienne à l’instant. Ce tissu par mon tissage lent, progressif, mais laborieux et sûr, a pu devenir un tissu soyeux et solide, de bonne qualité. Il était destiné à servir de tunique confortable. Mais par mon acte irréfléchi, ce tissu est détruit, la belle tunique ne sera pas et il faudra reprendre à zéro tout mon labeur pour arriver encore une fois au même résultat.
Tout comme toi, mon fils. Les études et le savoir s’acquièrent avec un lourd labeur, beaucoup de patience, d’énergie et de concentration. Si tu choisis de t’amuser plutôt que d’étudier, alors de tout ton travail de concentration antérieur, de toute ta patience et de ta sagesse accumulées il ne te restera plus rien ! Il te faudra tout reprendre à zéro ! »

Et voilà comment la mère de Mengzi, sans punition, sans correction violente, ou colère abusive inculqua à son fils, Mengzi, toute la valeur des études. Mengzi devint ainsi très jeune, à l’âge de 15 ans, un des disciples du petit-fils de Confucius, avant de devenir lui-même un des grands maîtres de la philosophie chinoise.

vendredi 11 mai 2007

Wenzhi, le célère médecin

Il y a fort longtemps, le royaume de Song avait la chance de compter parmi ses sujets le meilleur médecin de tout le royaume et de tous les royaumes voisins. Wenzhi était sans aucun doute non seulement le plus doué de ses confrères connaisseurs et praticiens en médecine mais également le plus soucieux de moralité. Il possédait là les deux qualités indispensables pour devenir un excellent médecin. Sa réputation n’était plus à faire et Wenzhi s’adonnait tous les jours à la pratique de la médecine pour sauver les sujets de son royaume.

Le royaume de Qi était le royaume voisin à celui de Song. Or ce dernier était en train de vivre une tragédie, le roi était souffrant. Il avait contracté une maladie grave que tous les médecins de Qi avaient tenté de soigner, en vain. Depuis déjà des mois, sa majesté souffrait.
Alors, la cour du royaume décida de faire appel à Wenzhi, médecin au royaume de Song, leur dernier espoir ! On envoya un serviteur au royaume de Song afin de prier le fameux Wenzhi de se rendre au royaume de Qi pour examiner et soigner sa majesté le roi.

Après un long voyage, Wenzhi arriva enfin au royaume de Qi. Il ne fallait plus attendre, le roi éprouvait, avec de plus en plus de difficultés, sa maladie. Aussi, à son arrivée au royaume de Qi, Wenzhi se dirigea immédiatement dans la chambre de son altesse. Il examina le roi méticuleusement, fit un examen complet puis sortit sans un mot. Hors de la chambre, il entraîna ainsi le serviteur du roi à l’écart de la chambre, loin des murs renfermant sa majesté, qui, disait-on, possédaient des oreilles !
Et face au serviteur du roi, Wenzhi s'exprima enfin.
« La maladie de votre majesté peut être traitée. Elle n’est pas incurable. Cependant, je crois deviner et pouvoir avancer sans me tromper, que si je guéris le roi, ce sera au prix de ma vie.»
« Mais enfin, maître Wenzhi, qu’entendez-vous par là ? Qu’avancez-vous ? Comment cela serait-il possible ? Une vie contre une mort ? »
« Je m’explique. La maladie de votre majesté est une maladie du cœur qui le ronge. Cette maladie, sans cesse refoulée par le roi, le détruit maintenant physiquement. Cependant, une simple grosse colère pourrait soulager la pression qui fait son mal intérieur. Ce mal remonterait à la surface et ne le rongerait ainsi plus de l’intérieur. Mais si je provoque la colère de votre majesté, alors il m’en coûtera la vie. »
« Oh, il en est ainsi. » commença à répondre le serviteur de l’empereur.
« Mais monseigneur» reprit celui-ci «nous ne pouvons continuer à laisser souffrir notre roi. Il faut malgré tout le soigner au plus vite. Soignez-le, et je vous donne ma parole que moi-même premier serviteur du roi et son altesse la reine, la mère du royaume interviendront en votre faveur auprès de sa majesté. Ainsi il ne vous arrivera rien. Soyez sans crainte!»
« Bon » puisqu’il en est ainsi, pour votre cœur fidèle et noble et parce que mon traitement est désormais connu de vous et sera connu de votre majesté et votre altesse la mère du royaume, je vais alors pouvoir commencer à examiner votre roi.»

La date et l’heure exactes de la visite choisis par le médecin Wenzhi pour examiner sa majesté de Qi furent communiquées par le serviteur au roi. Mais contrairement à ce qu’il était convenu, Wenzhi s’excusa trois jours durant, prétextant diverses raisons sans fondements. Le quatrième jour, Wenzhi se présenta enfin à la cour.
Ce jour-là, Wenzhi se dirigea directement dans la chambre du roi, et s’en prendre la peine de le saluer dignement comme il se doit selon les usages, ni même sans respecter la politesse de retirer ses souliers avant de consulter un malade sur son lit, il grimpa sur le lit de sa majesté, foula de ses pieds chaussés de souliers crasseux les vêtements royaux et feignit de consulter sa majesté sans prendre la peine de l’examiner réellement.
Bien sûr, sa majesté qui avait déjà attendu trois jours la visite de ce célèbre médecin, eut tout d’abord sa colère apaisée par la bonne nouvelle de la venue de Wenzhi. Mais lorsque le roi eut assisté au spectacle désastreux de la consultation de Wenzhi, lorsqu’il fut suffisamment maltraité par ce médecin insolant, tout d’abord stupéfait, tout à coup sa colère éclata !! Un torrent d’injures jaillit du cœur de sa majesté et mieux que tous les traitements et piqûres qu’il avait eu auparavant, ces injures l’avait guéri. Il était guéri. Un miracle !!
Cependant, la colère était plus forte. Il ne pouvait oublier toute l’humiliation qu’il avait subi, lui sa majesté le roi ! Non il ne pouvait accepter un tel comportement de la part d’un sujet dans son royaume ! Et malgré l’intervention de son plus fidèle serviteur et de son épouse, son altesse royale, pour épargner Wenzhi, le roi de Qi ne pouvait accepter ce comportement ! Cela dépassait son entendement!

Alors Wenzhi fut emprisonné! Les prières et les supplications de sa cour ne pouvant être d’aucun recours à Wenzhi.
Il fut mené à la torture pratiquée à l’époque: torturé au chaudron.
Cependant, face au roi toujours dévisagé par la colère, Wenzhi resta fidèle à sa médecine, et ses dernières paroles furent pour le roi :
« J’ai agi comme je l’ai fait par devoir. Mes méthodes sont justes et loyales envers la pratique de la médecine. Le traitement de la maladie fut exposé avant d’être réalisé. Tout dans ma pratique fut en accord avec l’exercice de la médecine. Alors, tuez-moi, je n’ai pas de regret!».

Le roi ne put en entendre davantage, furieux, il ordonna la mort de Wenzhi.

vendredi 20 avril 2007

L'arbre à sapèques

Voici la légende de l'arbre à sapèques

Il y a déjà fort longtemps, dans la Chine ancienne, la légende parlait d’un arbre à sapèques. L’arbre de la fortune. Cet arbre se trouvait au sommet de la plus haute montagne de Chine. Avant de pouvoir atteindre cet arbre et de l’admirer avec toutes ses sapèques, ses pièces d’or et d’argent, il fallait gravir un versant de montagne très abrupt. Mais une fois arrivé au sommet, alors la fortune s’offrait à celui qui le secouerait.
Secouer l’arbre une première fois et des sapèques tomberont, disait la légende.
Une deuxième fois et de l’argent tu récolteras, affirmait toujours cette légende.
Et à la troisième fois, des lingots d’or tu auras.

Hélas, cet arbre à sapèques était capricieux. L’arbre se trouvait certes au plus haut sommet de la montagne de Chine, mais il lui arrivait aussi de disparaître. Ses apparitions étaient ainsi exceptionnelles. L’arbre à sapèques se faisait rare, si bien que les habitants du village sur le versant de la montagne se rendaient souvent au sommet de cette dernière, pour y guetter son apparition. Mais en vain. Cet arbre n’était qu’une légende dans le cœur de ceux-ci. Et les plus jeunes n’y croyaient même plus. Depuis des générations et des générations, personne n’avait aperçu cet arbre. C’est ainsi que même le plus avare des avares du village, le dénommé Huang, avait renoncé à ce rêve de voir un jour l’arbre à sapèques.

Quand une année, le premier jour de cette année exactement, un rayon lumineux argenté et doré jaillit de la montagne. Un halot lumineux, féerique enveloppait le sommet de la montagne. Scintillant, miroitant, le sommet attira les regards des habitants. Et par cette froide matinée d’hiver, la lueur dorée vint réchauffer le cœur des habitants. Tous savaient que cette lueur n’était autre que le rayonnement des branches de l’arbre à sapèques !
Tous les habitants, en cœur, et encore plus joyeusement qu’ils auraient souhaité les bons vœux à leurs voisins, s’écrièrent « l’arbre à sapèques, l’arbre à sapèques ! Il est apparu ! Il est apparu ! Venez voir ! Il est apparu ! ». Tous effaré, en plein rêve, en train de vivre une légende qu’ils avaient entendu se répandre dans la bouche des anciens, tous rester là, debout, à observer cette lueur. La bouche ouverte, ébahis, tous commençaient à rêver de ce qu’ils allaient pouvoir faire avec leur or.

Aussi, à cette grande nouvelle, Huang le vieil avare, ayant depuis longtemps projeté ce périlleux voyage au sommet de la montagne, ne resta pas à rêvasser comme ses voisins. En quelques secondes, il rassembla des vivres, noua son baluchon rempli de vivres autour d’un bâton et sans prévenir personne, avec son paquetage sur l’épaule, prit la route ; direction, le sommet de la montagne, où se trouvait l’arbre à sapèques.
Huang, l’avare, motivé par les promesses de la légende de l’arbre à sapèques, défia tous les périls de la nature. Versant abrupt, escarpé, difficile à escalader, rien ne lui résista. En effet, la vision de tout cet or, la pensée de savoir qu’un arbre produisant de l’or l’attendait en haut de la montagne, eu raison de la pente. Courageux, motivé, il brava tous les dangers, affronta les pires escarpes. Dix jours de calvaires plus tard, il atteignit enfin le sommet de la montagne.

Il était là, en face de lui, l’arbre à sapèques scintillant, dans toute sa splendeur, argenté, doré miroitant !!!
Le vieillard, le cœur affolé, se répétait à lui-même, en sourdine pour être sûr que personne ne l’entende : « Je l’ai trouvé ! Je l’ai trouvé ! Je l’ai trouvé ! » Et comme un fou, il se précipita au pied de l’arbre. Il l’embrassa de toutes ses forces, le serra dans ses bras et au plus vite le secoua sans relâche de toutes ses forces.
« Giling, giling, giling… »
Et comme l’avait prédit la légende, de cet arbre tomba des sapèques. Le sol en fut recouvert.
« Quoi, mais ce ne sont que des vulgaires sapèques. Qu’est-ce que j’en ferai moi de cet argent qui n’est même pas véritable. Moi je veux de l’argent ! Du vrai !»
Alors, il entoura l’arbre de ses bras, le serra à nouveau et le secoua de toutes ses forces. Et oh merveille ! De l’argent, blanc, brillant argenté, tomba de l’arbre. Le sol en fut couvert, un tapis blanc, étincelant, comme lorsque la neige recouvre le sol montagneux, un paysage splendide.
Mais le vieux Huang, ne put se contenter de cet argent. Sachant que l’arbre à sapèques était aussi réputé pour donner de l’or, après avoir obtenu l’argent désiré, il voulait aussi l’or de l’arbre. Alors, il reprit l’arbre entre ses bras et le secoua encore trois fois et de toutes ses forces. Comme prévu, à la troisième fois, l’arbre à sapèques lui donna tout l’or qu’il possédait. Le sol, jaune, doré, miroitant était recouvert d’or.

Le vieux Huang, au milieu de tous ces lingots, se dit que grâce à cet arbre, il pourrait enfin devenir l’homme qu’il avait rêvé d’être, l’homme le plus riche du monde. Plus riche encore que l’empereur lui-même. Pourquoi se contenter de ces quelques lingots alors que l’arbre à sapèques était encore là, à disposition pour lui fournir la plus grande fortune du monde ! Non il n’allait pas s’arrêter là. Il fallait encore le secouer l’arbre à sapèques !
Il le serra dans ses bras, le secoua de toutes ses forces tout en rêvant de ses lingots, quand une pluie de lingots le frappa. Son corps fut meurtri par les lingots. Une averse de lingots était en train de l’abattre. Le vieillard heureux parmi son or ne pouvait se résigner à lâcher le tronc de l’arbre à sapèques et continuait ainsi à secouer. Il secouait, secouait!!
Quand tout à coup, un grand bruit se fit entendre, comme si le ciel s’était écrasé sur la terre. Au pied de l’arbre, une grande crevasse se forma. L’arbre à sapèques toujours dans les bras du vieil avare se renversa et le vieux Huang fut pris au piège sous celui-ci. Il était immobilisé. Plus un geste, il ne pouvait plus rien faire. Là, étendu dans la crevasse, perdu au milieu des lingots. Puis les sapèques, l’argent et les lingots progressivement s’effacèrent de la vue du vieillard, tout disparut.
Et c’est ainsi que pour son rêve, son rêve de faire fortune, il avait perdu sa vie ! Au prix de sa vie, il avait tenté son rêve de richesse.

vendredi 30 mars 2007

Un jour sans feu : la fête du froid

Il s'agit d'une histoire de la période appelée « Printemps et Automne », entre le VIIIème et le Vème siècle avant notre ère. Suite à l'évènement relaté dans cette histoire, une fête est née : la fête des aliments froids, le jour où le feu est interdit. Aujourd’hui disparue, ce jour de mémoire était, jusqu’à l’époque Tang, fêté quelques jours avant la fête des morts. La date exacte de cette commémoration est jusqu’à maintenant toujours indéfinie ; les dates retrouvées dans les archives ne concordant pas. Par contre, une chose est sure sur l’origine de cette fête, il s’agit de l’histoire qui unit le roi Jin Wen Gong et son vassal, Jie Zhi Tui.

Voici leur histoire…

A l’époque des Grands Royaumes de la période Printemps et Automne, vivait le roi Jin Xian Gong. Il était à la tête d’un royaume puissant, très convoité. Ses fils, l’aîné Shen Sheng, Zhong Er et le troisième Yi Wu espéraient tous succéder à leur père. Mais ce dernier, follement amoureux de la concubine Li Ji, écoutait aveuglément ses recommandations. Li Ji, par quelques intrigues, parvint ainsi à convaincre l’empereur Jin Xian Gong que ses fils n’avaient pas les qualités nécessaires à cette charge d’empereur. En revanche, le fils de Li Ji, la concubine, semblait être le meilleur successeur possible à l’empereur. Face à cette situation, l’aîné des fils de Jin Xian Gong, Shen Sheng tenta d'assassiner son père par empoisonnement. Cette trahison fut découverte et lui fut fatale. Il fut poussé au suicide. L’empereur, Jin Xian Gong plongea alors dans un état de colère monstrueux et de paranoïa atroce et poussa ses deux fils restant à l’exil.

Ainsi, Zhong Er, accompagné de ses vassaux, dont le fidèle Jie Zhi Tui, avait choisi l’exil au Royaume de Wei. Le chemin jusqu’à ce royaume fut long : 14 ans d’exil, ayant réunis Zhong Er et Jie Zhi Tui. Dans les moments les plus durs, alors que par monts et par vents ils ont continué à marcher, Jie Zhi Tui sans défaitisme, sans relâche, continua à servir son seigneur Zhong Er. Enfin parvenu au royaume de Wei, Zhong Er s’allia à l’empereur de Wei par mariage avec sa fille.
Par la suite, fort de l’alliance de ce royaume et son père étant décédé, il put enfin regagner sa place en son royaume de Jin. Accompagné des ses vassaux, il se déclara empereur de Jin et devint l’empereur Jin Wen Gong.


L’heure de gloire sonnait pour tous les vassaux de Jin Wen Gong, qui décida de les remercier pour leur fidèle service et sut offrir à tous un poste de gouverneur. Tous, sauf un, le plus fidèle des fidèles, mais aussi le plus loyal, celui qui savait s’effacer complètement pour servir son futur empereur, le vassal Jie Zhi Tui. Lui seul n’obtint de place de gouverneur. Celui-ci, trop vertueux, n’osa demander sa place et se retira visiter sa vieille mère qu’il n’avait pas vu depuis ses longues années d’exil.

Pendant ce temps, l’empereur Jin Wen Gong reçut un rouleau de bambou où, lui informait-on, un des fidèles, le plus fidèle peut-être d’entre ses vassaux, avait été oublié. Et immédiatement, Jin Wen Gong se souvint du vassal Jie Zhi Tui, celui qui part temps glacial, alors que la seule nourriture disponible était elle aussi glacée, avait réussi à se procurer de la soupe pour son futur empereur, Jin Wen Gong. Comment avait-il pu l’oublier ? Il voulut réparer son erreur sans plus attendre et envoya chercher Jie Zhi Tui. Trop tard. Ce dernier venait de quitter sa chambre. N’étant pas nommé gouverneur, il n’avait plus sa place dans la capitale et était rentré chez lui. Jin Wengong venait de rompre l’alliance tacite entre Jie Zhi Tui et lui-même, par un simple oubli qui changea à jamais leur destin!

Jie Zhi Tui avait retrouvé sa mère, dans son village natal. Sa mère, heureuse de revoir son fils, fut cependant très inquiète de le voir revenir.
« Fils, quelqu’un t’a voulu le déshonneur paraît-il? Tout le royaume en parle. Jin Wen Gong t’aurait-il réellement rejeté?»
« Mère, peut-être n’ignorez-vous pas que Zhong Er est le seul fils restant de feu l’empereur Jin Xian Gong. Ainsi à la mort de son père, ZHong Er avait tous les pouvoirs pour rentrer au royaume de Jin et devenir empereur à son tour. La foule, les soldats, les vassaux tous l’adulaient pendant son exil. Aujourd’hui, désormais revenu, il est acclamé par la foule ! Il est l’empereur de notre royaume et personne ne peut le contester. Cependant, autour de lui, vivent de nombreux brigands et vils menteurs parmi ses soldats et vassaux. En exil, leur pouvoir s’est accru et leur influence sur Zhong Er s’est renforcée. Désormais, ils occupent tous une place de gouverneur et sont ainsi à la tête du royaume aux côtés de Jin Wen Gong. L’empereur a choisi de me rejeter, je ne peux qu’accepter cette décision. Moi loyal et fidèle, jamais je me plierai à suivre leurs ordres et à gouverner avec ces bandits. Je préfère me retirer que de mendier un poste auprès de ces chiens».
«Fils» conseilla sa mère, «ton cœur s’est ouvert à moi, ce qui me touche profondément. Mais ne serait-il pas plus sage d’en informer directement sa majesté l’empereur?»
« Mère, est-il encore utile de parler de cela? L’empereur a déjà pris sa décision. Que pourrais-je lui dire, conseiller moi? Qui suis-je pour cela? Ne serait-il pas préférable de me retirer dans la montagne et d’y finir mon destin?»
« Et bien, fils, s’il en est ainsi, je t’accompagnerai dans ta retraite. Ensemble nous nous retirerons dans la montagne».
« Mère, comme il vous plaira».
Et c’est ainsi que Jie Zhi Tui et sa mère se retirèrent dans la montagne Mian.

De son côté, l’empereur Jin Wen Gong, terriblement attristé par son oubli impardonnable, décida de chercher Jie Zhi Tui pour le prier de revenir à ses côtés. Il avait la ferme intention de lui prouver qu’il comptait encore parmi les fidèles de l’empereur. Un simple oubli pensait-il. Un rappel suffirait ainsi pour convaincre Jie Zhi Tui de revenir à la cour.
Alors, Jin Wen Gong, informé de la retraite de Jie Zhi Tui dans la montagne, envoya ses soldats chercher son vassal. Mais à de nombreuses reprises, Jie Zhi Tui refusa son retour auprès de l’empereur.

Ces refus répétés inquiétaient et rongeaient Jin Wengong. Il avait commis une erreur. Serait-elle réellement irréparable? Pourquoi Jie Zhi Tui ne voulait donc pas revenir à ses côtés?
« Que faire ! Jie Zhi Tui a vécu à mes côtés pendant 14 années, sans jamais me trahir, ni même m’abandonner. Il a été le plus fidèle. Mais comment ai-je pu l’oublier !! C’est impardonnable. Sa loyauté et sa vertu ne me le pardonneront jamais ! Comment mettre un terme à cette douloureuse situation? Je n’en peux plus. Jie Zhi Tui ne veut pas répondre à mes soldats et gouverneurs. C’est décidé, je vais y aller moi-même.
Que l’on prépare mon char, nous allons à la montagne Mian»

Le cortège impérial s’orienta vers la montagne Mian. Arrivé à la demeure de Jie Zhi Tui, l’empereur, sans même avoir eu le temps de parler à ce dernier, se vit rejeté par quelques mots très simple de Jie Zhi Tui :
«Votre majesté, inutile de pénétrer dans ma demeure. Je ne me rendrai pas à votre cour. Je refuse d’exercer le poste de gouverneur. J’ai choisi de me retirer. Telle est ma décision, rien ne me fera changer! Je vous en prie, rentrez à la cour!»

Jin Wen Gong, profondément attristé, se retira malgré tout, mais seulement de quelques mètres. Caché derrière la forêt qui encerclait la maison de Jie Zhi Tui, l’empereur et ses soldats réfléchirent à la meilleure façon de faire revenir son fidèle vassal.
«Votre majesté, permettez-moi!» suggéra un de ses gouverneurs. «Pour l’instant, Jie Zhitui se refuse à sortir, mais peut-être pouvons nous le forcer à sortir. En mettant le feu à la forêt autour de sa demeure, par piété filiale, pour sauver sa mère, il sera contraint à sortir, et n’ayant nulle part où aller, votre majesté pourra les recueillir tous les deux à la cour. Il ne pourra plus vous refuser votre main tendue».
«Cela me paraît être une bonne stratégie. Nous allons nous poster aux pieds de la montagne, derrière sa demeure. La forêt n’abrite sa propriété que par devant, ils peuvent sortir à l'arrière. Nous l’accueillerons à sa sortie».
Jin Wen Gong ordonna l’incendie de la forêt de la montagne Mian.

L’empereur, posté derrière la montagne, attendit la sortie de Jie Zhi Tui. En vain. Jie Zhi Tui refusa de quitter sa demeure. L’incendie prit alors plus d’ampleur qu’ escompté.
« Votre majesté vite, vite! Ne restez pas là! L’incendie s’étend sur toute la montagne. Vite partons!»
«Non» rétorqua sèchement l’empereur au gouverneur qui se jetait à son secours. «Toi, tu restes ici et essaye de retrouver Jie Zhi Tui. Il faut venir à son secours. Il va périr ici! Et par ta faute et ton idée stupide!»
Le feu se propagea pendant trois jours et trois nuits. Lorsqu’il fut enfin éteint, les soldats de l’empereur inspectèrent les lieux de l’incendie. Ils découvrirent deux corps calcinés, accrochés à un arbre. Jie Zhi Tui et sa mère avaient choisi la mort plutôt que de perdre leur honneur en exerçant la fonction de gouverneur aux côtés de tous ces soldats et seigneurs corrompus.

Jin Wen Gong, quant à lui, ne put ni oublier ce terrible jour, ni se pardonner ses deux erreurs épouvantables : l’une d’avoir oublié son fidèle parmi les fidèles au poste de gouverneur et l’autre, d’avoir causé la mort de ce dernier par son entêtement à vouloir rattraper sa première erreur.
Afin de ne pas oublier Jie Zhi Tui une nouvelle fois, il ordonna le lendemain à ce que tous les foyers de feu, toutes les bougies, toutes les moindres petites flammes soient éteintes en souvenir de celui qui avait été à ses côtés quand l’empereur avait eu froid et à celui qui périt dans les flammes!