vendredi 16 février 2007

Les origines de la danse du dragon

Voici une légende sur l'origine de la danse du dragon.

Selon la légende, il y a déjà bien longtemps en Chine, au Zhejiang, dans la province de Jinhua, coulait une rivière nommée « la merveilleuse », au pied de « la montagne enchantée».

Sur les bords de la rivière, la terre était fertile. Les cultures y foisonnaient. Les champs de riz bien irrigués permettaient de nourrir toute la population du village avoisinant la montagne enchantée.

Dans ce village, vivait un riche notable qui aimait à se promener sur ses terres. Le printemps, sa saison de prédilection, était tout ce qui donnait un sens à sa vie. Aussi, monté sur son mulet, il aimait, en compagnie de son drille, se promener quotidiennement le long de ses terres.
« Oh, les fleurs de cerisier sont écloses. Quel paysage splendide. Le printemps est arrivé mon ami. Regarde ces arbres fruitiers, leurs fleurs sont magnifiques, d’une vitalité exceptionnelle»
«Maître, vous avez créé un jardin d’une beauté merveilleuse. Notre maître a un savoir-faire vraiment extraordinaire».

Quand, au loin, arriva une étrange cargaison. Trois hommes portaient une immense cage renfermant un énorme serpent.
« Allez, dépêchez-vous ! On va apporter ce serpent à l’aubergiste du village. De la bonne viande de serpent, il ne pourra pas refuser de nous l’acheter. C’est si rare un aussi gros serpent».
« Ah ça frère, c’est une bonne prise que nous avons fait là ! »

Le riche notable, qui s’intéressait à tous les passants sur son domaine, vint à leur rencontre.
«Oh là, mon bon ami. Que détiens-tu enfermé dans cette cage?»
«Un serpent que nous avons capturé ce matin, près de la rivière, maître»
«Puis-je y jeter un coup d’œil?»
« Oh mais, bien sûr, mon seigneur!»
Le maître du domaine se pencha, observa la taille et la couleur superbe de ce serpent. Puis, il fit face au serpent. Celui-ci le regarda, les yeux pleins de larmes. Le serpent avait un regard si triste qu’il en émut le vieux maître.
« Dis-moi l’ami, accepterais-tu de me le vendre, ce serpent?»
« Mais avec plaisir, maître. Et pour quelques pièces de plus, nous vous l’apporterons même jusqu’à votre humble demeure»
«C’est entendu» conclut ainsi le maître du domaine proche de la rivière merveilleuse.

Le serpent prit place chez le seigneur du domaine. Il fut très vite apprivoisé. Il était si fidèle qu’il mangeait tout ce que son maître mangeait. Le riz, les céréales, les fruits, il pouvait tout avaler. Il était devenu un compagnon. Et des jours paisibles s’écoulèrent.

Le printemps céda la place à l’été qui respecta sa réputation de saison chaude. Elle fut même torride cette année là. Aucune goutte de pluie ne tomba. La rivière merveilleuse transpira. Elle eu si chaud qu’elle fut progressivement toute déshydratée. La rivière merveilleuse, ainsi asséchée, inquiéta les fermiers du village et de toute la province. Qu’allaient-ils devenir ? Sans eau pour arroser les plantations, ils ne pourraient bien sûr pas y avoir de récoltes. Et comment survivraient-ils tous à cette catastrophe?
Alors les habitants s’en remirent à l’empereur de jade céleste et au vénéré Tudi Gong. Des cérémonies d'offrandes furent organisées. Le maître, seigneur du village, s’adressait aussi chaque soir à sa majesté l’empereur de jade céleste, lui implorant de protéger les fermiers et les paysans de cette misère. Il demandait juste que la pluie tombe pour fertiliser toutes ces terres arides!

Lorsqu'une nuit, dans son sommeil, le seigneur reçut une visite : celle du père vénéré de la terre, le grand Tudi Gong.
« Les paroles, les offrandes et la requête des habitants de ton village et domaine ont profondément touché notre majesté. L’empereur de jade céleste m’a prié, moi Tudi Gong, père de la terre, de t’apporter le message que voici :
Le grand serpent à la rivière tu déposeras
Dans deux jours la pluie tombera

Le maître du domaine, le lendemain, se réveilla.

Bien sûr, ce n’était qu’un rêve, mais celui-ci paraissant plus vrai que sa vie réelle elle-même, il décida de se séparer de son serpent et de le déposer au bord de la rivière, comme le souhaitait sa majesté l’empereur de jade céleste.

Il dit adieu à son serpent et lui promit de l’honorer en brûlant de l’encens et en le saluant à genoux, chaque jour, pour la pluie qu’il ferait tomber. Puis laissant là son serpent, il rentra chez lui.
Deux jours passèrent, et la pluie tomba.
«Haha» se réjouit le maître, «alors mon rêve n’était donc pas seulement un rêve. Le serpent a réellement permis à la pluie de tomber»
Les lacs se remplirent. Les buffles reprirent leur nage et leur labeur dans les champs de riz. Les jeunes filles purent enfin se retrouver au bord de la rivière pour la lessive et les fermiers, soulagés, purent continuer leur culture. La vie reprit ainsi son cours.

La récolte cette année fut, contre toute attente, très bonne. Ce fut une année riche en culture. Et tout cela grâce au grand serpent de la rivière merveilleuse.
Alors pour remercier ce serpent, celui qui leur a sauvé la vie, tous les habitants se sont mis à brûler de l’encens sur le bord de la rivière. Et parce que le serpent aimait le riz et les gâteaux à base de riz, pour le remercier, les habitants lancèrent dans la rivière de nombreux petits pâtés de riz en offrande. Ils espéraient ainsi que le serpent les aiderait à contrôler la pluie et le beau temps afin d’avoir une autre année aussi bonne.

Cependant, malgré ces offrandes, le temps se dérégla. La sécheresse précédait ainsi les averses. Les intempéries se multipliaient. Et l’ancien maître et protecteur du serpent ne cessait, quant à lui, de penser à son serpent.
Quand, soudainement, son ami, son fidèle compagnon d’autrefois, le serpent fit son apparition.
«Eps, pst!»
«Ah, mon ami, le fidèle serpent de la rivière merveilleuse, comme je suis ravi de te voir»
« Mon maître, vous vous trompez. Ce que vous voyez actuellement de moi n’est pas ma réelle apparence. Je suis le dragon, ordonnateur de la pluie et du beau temps et grand administrateur des aliments et des cultures terrestres. Mais il se trouve que j'ai enfreint quelques règles. Aussi, sa majesté l’empereur de jade céleste a choisi de me punir pour mes fautes en me faisant prendre pour corps celui de serpent et en me déposant sur la terre. C’est comme cela que vous m’avez rencontré et apprivoisé. Vos gestes et vos attitudes ont profondément touché sa majesté l’empereur de jade céleste. Sans vous, maître, je serais encore sur terre. Votre bonté a servi ma cause et c’est ainsi que l’empereur par l’intermédiaire du père de la Terre, Tudi Gong, vous a demandé de me rendre au ciel en me déposant sur le bord de la rivière.
Mais depuis mon retour au ciel, un autre problème est survenu. Les habitants me prient tous les jours et ne cessent de m’offrir des mets les plus délicats et fins. Or toutes cette nourriture, gaspillée par les habitants, a mis notre majesté l’empereur de jade céleste dans une colère terrible. Il a prévu de vous punir à votre tour deux années consécutives. Les intempéries viennent de ses ordres. Je vous en prie, maître, il vous faut exhorter la population à ne faire des offrandes qu’avec de l’eau claire. Aucun aliment ne doit être offert»
« Très bien. C’est entendu. Je vais en informer les habitants de la province Jinhua»

Mais la population, habituée depuis toujours à offrir les meilleurs plats aux divinités et aux personnes vénérées ne respectèrent pas les ordres de sa majesté. Les offrandes continuèrent.
Et sa majesté ne put davantage supporter ce gaspillage. Ces hommes désobéissants et gaspilleurs le mirent dans une colère monstrueuse et il choisit de sacrifier le dragon. Celui-ci fut découpé par les rayons de la colère de l’empereur de jade céleste. Et son sang se versa sur toute la province Jinhua. Ce jour là, la pluie fut rouge, rouge sang. Les hommes se consultèrent et par peur d’une terrible catastrophe demandèrent conseil au seigneur des terres de la province, l'ancien maître du serpent.
«Maître» l’informèrent-ils, «aujourd’hui la pluie est rouge. Aussi, nous avons vu tomber du ciel, un dragon, mais le plus terrible, c’est que ce dragon n’est pas entier, mais découpé en de nombreux petits morceaux»
A ces paroles, le maître s’est précipité au bord de la rivière, que l’on nommait « merveilleuse». Il découvrit le terrible spectacle d’un dragon flottant sur la rivière, les larmes aux yeux, victime du gaspillage des hommes et de la colère de l’empereur.
Le maître, désolé, abattu, agenouillé et penché sur la tête du dragon, lui fit ses excuses :
« Mon ami, tu es la victime de notre entêtement et de nos mauvaises habitudes. Tout cela est entièrement de notre faute. Me pardonneras-tu?»

Et depuis ce terrible évènement, les hommes regrettèrent terriblement leur attitude. Aussi, dans l’espoir de reconstituer un jour le corps du dragon et de le revoir parmi eux, les hommes ont inventé une danse où le corps du dragon est manipulé par des branches de bambou pour faire danser son corps. Ce pas de danse, appelé « danse du dragon», est ainsi interprété tous les 15 du premier mois de l'année.

vendredi 9 février 2007

Sauvés par les lanternes rouges

Voici comment toute une population fut sauvée par les lanternes rouges.

A la fin de la dynastie Ming régnait en Chine l’empereur Chuang, Li Ze Cheng. En voyage dans son royaume, il arriva aux portes de la ville de Kaifeng. Toujours insoumise au royaume Ming, l’empereur Chuang avait choisi de la conquérir. Avec son armée, ils installèrent un campement près des murailles de la ville afin de permettre aux soldats de se reposer et de préparer leur stratégie d’attaque.

Les conseillers de Chuang l’informèrent :
« Votre majesté, la ville sera difficile à conquérir. L’armée a épuisé toutes ses provisions. Nos soldats ne pourront pas supporter de batailles supplémentaires. Il se trouve aussi que la province de Kaifeng est assez importante. La population est nombreuse. Nous devons préparer une stratégie d’attaque infaillible.»
« Oui, la population est élevée et toute intrusion que nous ferons dans cette ville provoquera de nombreuses victimes. Nous devons être prudents. Je ne voudrais pas encore une fois décimer des populations entières. Je vais d’abord m’introduire discrètement dans la ville afin d’établir clairement sa situation. Nous aviserons alors» enchaîna l’empereur.
Et l’empereur s'habilla comme un simple marchand de légumes ambulant, dans le but de pénétrer dans la ville pour en faire l’état des lieux.

Arrivée dans le centre, l’empereur Chuang put constater que la panique y régnait.
« Allez dépêchez-vous, l’armée de Li Ze Cheng, l’empereur Chuang est là. Ils ne vont pas tarder à attaquer. Allez tous à vos postes»pouvait-il entendre aux pieds de la muraille de la ville, là où les fortifications étaient en train d’être montées.
« C’est terrible ! L’empereur Chuang est là aux portes de la ville. »
« Il paraît qu’il a les sourcils rouges sang, et les yeux verts ! Là où il passe, l’herbe ne repousse plus !» percevait-il dans les discussions des habitants de la ville.
« Oui et toutes les personnes qui ont eu le malheur de croiser son chemin sont mortes, la tête tranchée. C’est un tyran invincible. Il coupe les têtes comme on coupe les concombres, en tranches fines!» racontaient les jeunes de Kaifeng.
« TTTTT, tout cela ne sont que des rumeurs !» lança un vieillard. «L’empereur Li Chuang n’est terrible qu’avec les ennemis. Moi au contraire, j’ai entendu dire qu’il est aussi bon envers la population qu’il est terrible envers l’armée ennemie.» Puis, apercevant le marchand de légumes ambulant, qui n’était autre que l’empereur lui-même, il l’interpella :
« Tiens et toi là bas! Oui, toi le marchand ambulant, tu as beaucoup voyagé pour vendre tes légumes. Tu as déjà dû rencontrer l’empereur Chuang. Comment est-il ?»
L’empereur heureux d’avoir l’occasion de mettre un terme aux rumeurs lancées par tous les officiers et seigneurs corrompus qui avaient réussi à s’insurger contre son pouvoir et son royaume, commença par leur raconter ce que le marchand ambulant avait soi-disant vu dans un village voisin reconquis par l’empereur Chuang.

« Oui; je l’ai déjà vu l’empereur Chuang. Il n’est non seulement pas immense avec les dents pleines de sang et les sourcils rougeoyant de cruauté surmontant des yeux verts terribles, mais il est surtout, comme vous et moi. Il ne paraît être qu’un simple citoyen seulement reconnaissable par son manteau d’empereur.»
« Aussi, je l’ai vu de mes propres yeux. Non seulement il libère les populations des taxes qui pèsent sur elles depuis que les seigneurs nous gouvernent, mais encore, tout l’argent des officiers et seigneurs superflu et gagné de nos taxes est reversé aux populations dans le besoin. A tous les pauvres dont l’argent fut spolié par les seigneurs locaux.»
Bien sûr les propos du marchand ambulant, qui n’était autre que l’empereur, firent de l’effet sur les habitants de la ville de Kaifeng. « AH bon ? Mais alors nous ne devons pas le fuir, mais au contraire rester là pour l’accueillir!» s’écrièrent les hommes de la ville.
« Oui mais, comment fait-il pour distinguer les simples habitants des seigneurs et officiers corrompus du royaume ? Il est facile de se tromper et de trancher la tête de n’importe qui!» lança un habitant.
« Mais oui, c’est vrai ça. Comment peut-il juger d’une personne rien qu’en la voyant. »
Et pendant que tout le monde chercher une solution, l’empereur Chuang observant un enfant tenant une lanterne rouge dans ses mains, eût une idée.
« Pourquoi tout le monde n’accrocherait-il pas une lanterne rouge à sa porte en signe d’allégeance à l’empereur. Ainsi de jour ou de nuit, l’empereur verrait ces lanternes et ne s’attaquerait pas à vos demeures. Oui c’est cela, les lanternes rouges seront le signe de reconnaissance des pauvres de la ville.»
« Oui mais comment les soldats de l’empereur sauront que nos lanternes rouges représentent notre pauvreté et qu’il faut ainsi nous épargner?» questionna un des habitants.
Et l’empereur Chuang qui avait presque oublié son déguisement dit aux habitants. Et bien, je vais écrire une lettre à l’empereur. Je vais l’avertir du code que vous avez établi entre vous. Ainsi informé, il lui sera aisé de trouver les seigneurs corrompus et l’armée quittera la ville le plus tôt possible. Mais surtout, n’informez pas les seigneurs et officiers locaux!» leur recommanda encore une fois l’empereur, sous son déguisement de marchand ambulant avant de partir.
Ainsi toute la ville se prépara à l’attaque de l’armée de l’empereur Chuang.

L’empereur, ayant rejoint son armée, avec ses généraux, informés du code des lanternes rouges, ensemble ils préparèrent le plan d’attaque. Quant aux officiers de la ville de Kaifeng, eux aussi, ils se préparèrent à l’attaque. Et voyant que les soldats de l’armée de l’empereur Chuang étaient quasiment aux portes de la ville, ils ouvrirent alors le barrage du fleuve jaune. Ainsi la ville inondée arrêterait les soldats ennemis. Et la population dans tout ça ? Oh et bien tant pis !

Le barrage ouvert, le fleuve déferla sur la ville. Il inonda la ville en quelques minutes. Face à ce terrible monstre marin qu’est le courant du fleuve jaune, les habitants furent bien démunis. Tout le monde se précipita sur les toits des maisons. Et les habitants, toujours confiants envers les paroles du marchand ambulant, même dans leur précipitation n’oublièrent pas les lanternes. Progressivement, les soldats purent repérer et sauver les victimes des inondations et des seigneurs locaux grâce aux lanternes. Et même avec tout leur or, les officiers et riches marchands corrompus de la ville ne purent être sauvés !

Depuis ce jour là, personne n’oublie de commémorer le jour où l’empereur Chuang sauva son peuple en accrochant des lanternes rouges.