vendredi 5 janvier 2007

L'histoire de An, le monstre légendaire

Voici l'histoire du terrible monstre An, le monstre du nouvel an chinois.

Selon la légende, la Chine ancienne était peuplée de serpents venimeux et de bêtes féroces en tous genres. Parmi ces animaux monstrueux, vivait un animal très étrange que l’on appelait «An». Ce monstre ne sortait que la veille du nouvel an pour dévorer les habitants des villages chinois.
Une année, alors que les heures séparant les habitants de la nouvelle année défilaient, un vieillard, venu de nulle part, s’approcha d’un village et y vit un mouvement de panique. Tout le monde préparait son baluchon. Tout le monde allait partir.
Trouvant ces préparatifs et l’attitude des habitants de ce village plutôt étrange, il pénétra dans le village pour demander auprès d’un habitant : «Jeune homme, serait-il aimable à vous de m’informer du malheur qui frappe votre village ? pourquoi prenez-vous tous la fuite?».
«Mais enfin monsieur, comment est-ce possible ! Vous n’êtes donc pas au courant ?» répondit le jeune homme, «aujourd’hui, nous sommes à la veille du nouvel an, la nuit est proche. «An», le terrible monstre, n’est qu’à quelques heures de notre village. Il approche. Il va bientôt tous nous manger !»
«Ah c’est donc ça!» «Non, mais c’est incroyable! Et personne n’aurait jamais osé faire face à ce monstre? Mon garçon, va vite finir ce que tu as à faire. Je dois poursuivre mon chemin».
Et c’est ainsi que le vieillard quitta le jeune homme et se dirigea vers les hautes montagnes, là où résidait «An» le terrible monstre.

Le vieillard s’enfonça dans le brouillard. La nuit approchait. Le vent se levait et le froid descendit de la montagne pour envahir tout le village. Le vieillard frissonna. Il arrivait enfin au repère du monstre «An».
Face au corps sec et maigrelet du vieux vagabond reposait un lézard géant. Il dormait profondément. Son souffle régulier était presque apaisant, si familier, si proche de celui des enfants endormis que notre ami le vagabond ne put avoir peur de ce dragon assoupit en face de lui. Ainsi, il lui fit des remontrances comme un professeur l’aurait fait à son élève.
« Eh, tu m’entends ! Oui c’est bien à toi que je parle. Tu effraies tous les habitants du village. Tu trouves cela amusant? Allez, il faut arrêter ce jeu maintenant. Il ne faut plus manger les hommes du villages voisins. C’est entendu ?»
Le monstre, tout d’abord interloqué par l’audace du vagabond, puis hilare face à ce minuscule petit bonhomme se redressa, fit face au vagabond, le pointa du doigt et hilare, il lui répondit:
«Le vieux, là, avec les cheveux tout blanc, le corps rabougri et la peau sèche, tu viens jusqu’ici, sur mon territoire, dans mon repère, tu n’as donc pas peur que je te mange comme tous les autres ?»
« Me manger moi? Un pauvre vieux monsieur sans défense te rapporterait quoi ? La peur des autres habitants? Le respect? Non bien sûr, me manger n’a rien d’un exploit. Je suis une proie trop facile. Mais toi qui est si fort, si puissant, si terrifiant, pourquoi ne vas-tu pas t’attaquer à la forêt des serpents venimeux? Eux, ce sont des adversaires à ta taille !»
«Ah bon ! Rien de plus facile, j’y vais de ce pas !»
Et voilà donc, An, quittant son repère, salive aux dents, accompagné du vieillard vagabond. Tous les deux se dirigèrent vers la forêt où vivaient les serpents venimeux du royaume.

Face à cette forêt, le monstre, en une aspiration, engloutit tous les serpents de la forêt. Il n’en restait plus aucun. «Alors tu vois, rien de plus facile! En une bouchée! Bon et après qu’est-ce qu’on mange?»
Le vieillard réfléchit, puis: « derrière la montagne vivent encore de terribles fauves, les tigres et les pumas sont des adversaires redoutables. Arriverais-tu à les manger eux aussi ? »
Le monstre, quelques peu insulté par cette comparaison que le vagabond avait osé faire avec des animaux aussi ordinaires que les tigres et les pumas, décida de lui montrer l’étendue de sa force, et lui dit : « Allez suis-moi, je vais te montrer moi ce dont je suis capable. Tu vas voir, les fauves du royaumes fuiront tous devant moi.» An fit un festin. Il réussit à éliminer tous les fauves du royaume en quelques coups de griffes et de pattes.

« Bon allez le vieux, finit de jouer maintenant. J’ai bien mangé. Je vais aller me reposer, mais avant si tu faisais mon dessert!»
« Attends, attends un instant veux-tu? Laisse-moi me dévêtir. Ainsi tu mangeras directement la chaire. Je serai bien meilleur sans mes vêtements. Laisse-moi deux minutes. Ca y est, j’y suis presque !» Tout en parlant, le vieux monsieur, tournant le dos au monstre «An», dénoua la corde qui maintenait sa tunique en place. Sous sa tunique, son torse était recouvert d’un carré de tissu rouge, un rouge éclatant.
Vêtu de ce carré rouge, il se retourna alors d’un bond face au monstre et, sûr de lui, bombant le torse, il fit face au monstre.
«Allez, viens me manger ! Je suis prêt ! Allez !»
«Non pas du rouge !! Ah quelle horreur !» Et le monstre s’enfuit à toutes jambes, pour retrouver son repère, un monde sans rouge !
Et oui le vieillard connaissait «An». Il savait que la seule chose qui pouvait effrayer le monstre était le rouge!

Pendant ce temps, les habitants du village étaient tous sur leur pied de garde, à attendre l’arrivée d’An, le monstre redoutable ! La nuit tombée, les habitants aperçurent soudain une silhouette. La panique se répandit dans tout le village!
« An arrive. Il est là. Je le vois !» «Vite courez!» pouvait-on entendre dans ce village.
Et oui, c’était bien lui, An le monstre. De redoutable, il était devenu une bête, monstrueuse certes, mais apprivoisée, enchaînée, avec sur son dos, son maître, celui qui avait su le dominer, avec un carré de tissu rouge!

C’est ainsi que les habitants de la Chine comprirent que seul le rouge pouvait repousser ce monstre. Et voilà pourquoi, aujourd’hui encore en Chine, à chaque nouvel an, vous pouvez voir des banderoles rouges accrochées aux portes de chaque demeure.